Zabou the terrible

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le chemin raboteux du salut, s'avance...

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Qui ne connaît pas au moins de nom « la petite fille Espérance », si chère à Péguy ? Mais qui l’a lu(e) ? Qui est allé la quérir pour de bon dans ce livre au nom si étrange, presque rebutant de Porche du mystère de la seconde vertu ? Puis, qui a osé l’écouter pour apprendre à marcher avec elle ?

 

Au soir, quand les cierges sont allumés pour nos défunts, quand les êtres vacillent parfois au souvenir de chers disparus, quand la nuit se fait lourde et pesante alentour, lire quelques mots de Péguy. Ces mots pesants, répétés, martelés. Pour nous dire et faire entrer dans nos crânes tout hautains ce mot qui rime avec enfance : « Espérance ».


L'espérance, dit Dieu, voilà ce qui m'étonne.


Moi-même.


Ça c'est étonnant.


 

Que ces pauvres enfants voient comme tout ça se
 passe et qu'ils croient que demain ça ira mieux.


Qu’ils voient comme ça se passe aujourd'hui et qu'ils
 croient qua ça ira mieux demain matin.


Ça c'est étonnant et c'est bien la plus grande merveille de notre grâce.


Et j'en suis étonné moi-même.
 

Et il faut que ma grâce soit en effet d'une force
 incroyable.


Et qu'elle coule d'une source et comme un fleuve
 inépuisable.


Depuis la première fois qu'elle coula et depuis
 toujours qu'elle coule.


Dans ma création naturelle et surnaturelle.


Dans ma création spirituelle et charnelle et encore 
spirituelle.


Dans ma création éternelle et temporelle et encore 
éternelle.


Mortelle et immortelle.


Et cette fois, oh cette fois, depuis cette fois qu'elle
 coula, comme un fleuve de sang, du flanc percé de
 mon fils.

 


Quelle ne faut-il pas que soient ma grâce et la force
 de ma grâce pour que cette petite espérance,
 vacillante au souffle du péché, tremblante à tous
les vents, anxieuse au moindre souffle,
 soit aussi invariable, se tienne aussi fidèle, aussi
 droite, aussi pure ; et aussi invincible, et immortelle, et
impossible à éteindre ; que cette petite flamme du 
sanctuaire.


Qui brûle éternellement dans la lampe fidèle.


Une flamme tremblotante a traversé l'épaisseur 
des mondes.


Une flamme vacillante a traversé l'épaisseur des 
temps.


Une flamme anxieuse a traversé l'épaisseur des 
nuits.


Depuis cette première fois que ma grâce a coulé 
pour la création du monde.


Depuis toujours que ma grâce coule pour la conservation du monde.


Depuis cette fois que le sang de mon fils a coulé 
pour le salut du monde.


Une flamme impossible à atteindre, impossible à éteindre au souffle de la mort.


 

Ce qui m'étonne, dit Dieu, c'est l'espérance.


Et je n'en reviens pas.


Cette petite espérance qui n'a l'air de rien du tout.


Cette petite fille espérance.


Immortelle.
[…]

 

 

La petite espérance s'avance entre ses deux grandes sœurs et on ne prend pas seulement garde à
 elle.


Sur le chemin du salut, sur le chemin charnel, sur 
le chemin raboteux du salut, sur la route interminable, sur la route entre ses deux sœurs la 
petite espérance.


S'avance.

 

Charles Péguy

 

Commentaires

1. Le mercredi, novembre 2 2011, 23:50 par Nitt

C'est curieux, la version que j'avais apprise en primaire était différente, mais marquait la même stupeur divine devant cette petite fille espérance...

Merci Zabou.

2. Le jeudi, novembre 3 2011, 06:24 par Corine

:-)

3. Le jeudi, novembre 3 2011, 17:15 par Isabelle

J'ai découvert la petite fille Espérance et Le Porche du mystère de la deuxième vertu quand je préparais le CAPES il y a fort longtemps... On avait des colles régulières et un jour, il y a eu un désistement, j'ai levé ma main au hasard... Un éblouissement!
;-)

4. Le mardi, novembre 8 2011, 21:49 par Zabou

:-) 

@ Nitt : c'est parce que le texte est en réalité assez long donc variable selon les endroits où l'on le tronque ! 

5. Le jeudi, novembre 10 2011, 11:03 par Dominique

Merci pour ce beau texte. Je sais qu'il va m'aider pour la préparation des funérailles. Ça me donne envie de lire le livre...

6. Le dimanche, novembre 13 2011, 23:58 par Zabou

@ Dominique : n'hésitez pas ! 

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