Zabou the terrible

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 Ça pleure à l’intérieur

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https://lh3.googleusercontent.com/proxy/0iCUbdokq8269DdRCaYQJZ1eVEv8XYG2lO6eU0LEcOeJmmX7WDnZN8PFNICPK0Eha7izIuUYCM9_Y_0XzdbWZfO6GYeeCUlCRZMbtmftSkc5NpAQmjZ6cbEKOzUxcrPJIacr5aEG. Rouault, Obéissant jusqu'à la mort

 

            Ça pleure à l’intérieur : depuis quelques jours, j’en fais le constat. Je n’ai jamais réussi à trouver de meilleure expression pour désigner des larmes qui ne se voient pas, qui sont tout intérieures et qui me donnent l’impression de ne même pas venir de moi. Cela m’arrive toujours face aux situations de souffrance les plus fortes : je n’arrive plus à pleurer physiquement, ça vient me toucher au plus profond de moi-même et ça pleure plus intensément que l’amertume salée ordinaire de mes larmes. Je me dis, parfois, que c’était cela dont il est question quand il est écrit dans l’évangile que Jésus est saisi aux entrailles, qu’il est bouleversé et pris de compassion tendre : mais, pour lui, Amour incarné, Visage de la miséricorde du Père, c’est cela devant chacune de nos souffrances. 

 

            Ça pleure à l’intérieur : le rapport de la CIASE, si nécessaire pour vivre dans la Vérité qui, seule, nous rendra vraiment libres et ajustés à Dieu, va sortir et tout indique qu’il est cataclysmique. Et les agresseurs comme les agressés sont de ma famille, l’Église, que je le veuille ou non : ces drames ont eu lieu dans ma famille, dans notre famille. Tous nous sommes concernés et il faudra éviter de se défausser trop vite d’une responsabilité. En Église, c’est-à-dire en famille, nous sommes tous dans le même bateau, même s’il semble s’agir en apparence du cousin éloigné bizarre qui a fait de la prison ou de l’oncle à la mode de Bretagne qui donne l’impression de ne faire que pleurnicher ou cracher sur la famille. Toute victime est de ma famille est j’ai à lui demander pardon ; tout agresseur et complice en couverture ou en silence est de ma famille et j’ai à prier pour lui, aussi dur cela soit-il. Il en va de la véracité de notre foi chrétienne qui ne se vit jamais tout seul.

 

            Ça pleure à l’intérieur et je n’ai pas les mots, même si j’en jette de nombreux sur le papier depuis quelques jours pour les supprimer immédiatement après. Ma prière est silence, simple présence, simple regard devant Lui car j’ai peur, aussi, des propos lénifiants ou des explications qui se voudraient trop rapides à ce sujet, dans la société comme dans la prière. Seigneur, Toi, Tu sais… 

 

Ca pleure à l’intérieur, ça me dérange, ça me trouble, ça me fait mal, aussi, mais qu’est-ce que ce petit dérangement de rien ? Cette douleur et ces larmes sont justes, elle ne sont qu’un maigre écho face aux cris de la multitude des victimes et nous avons, je crois, à accepter d’habiter cet inconfort, ce lieu dont on aimerait fuir pour retrouver un cocon plus rassurant de solutions ou d’ennemis communs à désigner comme boucs émissaires seuls responsables. Pourtant c’est la fuite de la réalité qui serait le pire ennemi. Habiter l’inconfort et nous retrouver en famille, un peu perdus, hébétés, sans juger les réactions : certains pleurant, d’autres criant leur colère en renversant certains pans de notre Église, certains même s’éloignant pour un temps parce que c’est trop dur. 

 

Ça pleure à l’intérieur et il est de notre devoir de garder ce temps sans mots articulés afin d’être capables de reconnaître, en vérité, comme certains après la deuxième guerre mondiale avec effarement « et dire que nous sommes capables de telles choses » ! Il faudra aussi probablement du temps pour retrouver la saveur de la légèreté d’une vie en Église sans dissonance. 

 

Mais, en attendant ce moment qui semble encore bien lointain, il y a un centre de gravité qui me semble à recevoir et à vivre. Ce centre de gravité pourra être de regarder, simplement, fraternellement, amicalement et pauvrement le Christ en croix, étant chargés du nom des victimes. J’ai en tête les mots du théologien Jean-Baptiste Metz devant la Passion : « Son cri en croix est celui de tous ceux que Dieu a abandonnés, mais qui pour leur part n’ont jamais abandonné Dieu. Face à la divinité de Dieu, Jésus tient bon. Dans l’abandon à Dieu sur la croix, il affirme un Dieu qui est autre et autre part que l’écho de nos souhaits, si ardents soient-ils ; un Dieu qui est plus et autre qu’une réponse à nos questions, quelques rudes et passionnées qu’elles puissent être. » (Memoria Passionis, Cerf, 2009, p. 30) 

 

            C’est de cette contemplation en vérité que pourront jaillir nos actions et probablement rejaillir une foi, une espérance et une charité véritables, passées au crible et au tamis de la souffrance et du péché des hommes. 

 

Commentaires

1. Le dimanche, octobre 3 2021, 15:02 par Henri

Oui cela nous touche tous et en tant que chrétiens nous sommes tous concernés.S'engager auprès des victimes, ne rien cacher et ne pas rester muet !!

2. Le dimanche, octobre 3 2021, 17:51 par Koz

Oui, petite sœur, ça pleure à l'intérieur.

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