Zabou the terrible

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Mot-clé - Neruda te spante

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vendredi, août 6 2010

Au fil des lectures

 Voici venir l’arbre, c’est l’arbre

de l’orage, l’arbre du peuple.

Ses héros montent de la terre

comme les feuilles par la sève,

et le vent casse les feuillages

de la multitude grondante,

alors la semence du pain

retombe enfin dans le sillon.

 

Voici venir l’arbre, c’est l’arbre

nourri par des cadavres nus,

des morts fouettés et estropiés,

des morts aux visages troublants,

empalés au bout d’une lance,

recroquevillés dans les flammes,

décapités à coups de hache,

écartelés par les chevaux

ou crucifiés dans les églises.

 

Voici venir l’arbre, c’est l’arbre

dont les racines sont vivantes,

il a pris l’engrais du martyre,

ses racines ont bu du sang,

au sol il a puisé des larmes

qui par ses branches sont montées

parsemant son architecture.

Elles furent fleurs, quelquefois

invisibles, fleurs enterrées,

d’autres fois elles allumèrent

leurs pétales, comme des planètes.

 

Et l’homme cueillit sur les branches

les corolles aux parois durcies,

il les tendit de main en main

tels des magnolias, des grenades,

et brusquement, ouvrant la terre,

elles grandirent jusqu’au ciel.

 

Pablo Neruda, Chant général