Zabou the terrible

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lundi, juin 17 2013

Tartagueule à la récré

 

C’est vrai qu’on qualifie parfois/trop souvent/de temps à autre les personnes sur leurs noms de famille, sur leurs visages, sur leur manière d’être… avant même de les connaître un peu. On appelle cela « préjugés », parfois cela devient même du « racisme » qui existe sous tant de différentes sortes.

 

Lui, ce collègue, ça planait dans l’air depuis un bon petit bout de temps,

Les boutades, les questions, les répliques à l’ironie de plus en plus cinglante sur mon nom de famille, ma « grande famille », ma « noblesse » dont il semblait visiblement mieux connaître la réalité (!!!) que moi-même : idées reçues, parfois un peu blessantes, je l’avoue, mais enfin qu’importe.

Et là, j’annonçais que je ne prendrai pas de permanence samedi matin au lycée car j’allais à une ordination. Réaction des autres : « wahou, ça c’est rare ! » Et lui :

- Oh, ça doit être fréquent chez toi.

- ???

- Non, mais je veux dire dans ta famille, ça doit être fréquent.

- Euh, non, je n’ai pas de prêtre dans ma famille <ndlr : j’aurais pu préciser que j’avais une grand-tante religieuse, certes >, là, c’est une personne que je connais moi, et ça reste toujours extraordinaire une ordination !

- Nan, mais ce que je veux dire, c’est que dans les familles comme la tienne. Ben, ça va toujours avec la religion. Le roi et la religion !

- Euh alors, pour parler clairement, je suis croyante mais mes parents ne le sont pas.

- Tes parents, ils vont forcément à la messe pour se faire voir, parce que ça se fait c’est toujours le cas dans les grandes familles comme la tienne !

 

Là, un collègue d’intervenir : « elle t’a dit que non ! Les gens ils s’embêtent rarement à aller à la messe quand ils ne croient pas… »

Le collègue de reprendre :  « Je te dis que c’est le cas dans les familles comme ça ! »

Moi de lui dire doucement : « non. Mes parents n’y vont pas… et personnellement, je ne vois pas pourquoi je m’embêterais à me lever si tôt le dimanche si je ne croyais pas ! »

 

Bon, on s’en moque de cette histoire mais cela montre – car ce collègue, ça pourrait être aussi moi devant d’autres situations ! - combien nous sommes pris dans nos vues d’avant, dans ce jugement a priori qui n’est pas le Sien parce qu’il n’est pas Amour : il est enfermement et non pas libération.

 

Le regard chrétien, c’est celui qui ne s’embarrasse pas de préjugés,

C’est celui qui cherche l’Autre en l’autre et qui le voit, déjà, malgré tous ses « non » qui cachent parfois Son Nom,

Conversion du préjugé, prêt-à-penser du cœur, à l’accueil, don donné. 

 

jeudi, juin 6 2013

Très riches heures de fin d’année

 

Très riches heures de fin d’année,

Les heures ne s’étirent pas, elles se font courtes, glissent entre les mains.

Il faut conclure mais, surtout, il faut finir.

 

Les heures se font responsabilité et poids sur les épaules :

C’est l’heure des conseils de classe,

C’est l’heure des orientations.

 

Il faut dire des oui et des non,

Il faut évaluer, dès aujourd’hui en un sens, l’avenir de ce jeune,

Se laisser interroger par ce qu’il a révélé ;

Tâcher de discerner ce qui semble le mieux pour lui,

Et, dans le même temps, tenter de ne rien tout à fait fermer.

Tracer un chemin à travers les questions, à travers les pressions de sa famille ;

A travers les contradictions de l’élève, surtout, surpris de se voir refuser cette section à 6 de moyenne.

Bref, à plusieurs, poser une décision sur un autre,

Une décision qui engage beaucoup.

 

Rudes heures…

Sortir sonnée de certains conseils, de certains propos,

Et quand même, sortir heureuse,

De les avoir vus progresser, un peu, grandir, surtout, de se dire qu’ils ont encore à s’épanouir, à découvrir, à vivre.

 

Et venir, même si les heures à passer ensemble ne se comptent plus que sur les doigts d’une seule main, Te rendre grâce et Te les confier encore, plus que jamais.

 

vendredi, mai 31 2013

Frémissement d’intensité poétique

 

 

 

Pour lancer une séance sur la poésie, j’avais eu l’idée de demander à mes élèves de réfléchir à un lieu « poétique », un lieu qui leur parlait de poésie, à chacun.

Je les avais laissés réfléchir quelques instants et puis je les avais interrogés, un par un.

 

Il y a ceux qui, à moitié pour m’épater, me donnaient des grandes villes « Venise ! Je rêve trop d’y aller ! » ou encore « Eh m’dame, la ville de Roméo et Juliette, là, j’sais plus comment elle s’appelle, où il y a les verrous, ça parle de passion ! »

Ceux qui rêvaient aux classiques « la plage sous les étoiles » ou « une belle mer bleue »,

Ceux qui osaient et me donnaient des lieux plus inconnus, plus personnels, aussi…

 

Ce garçon-là, je le sentais qui réfléchissait « à l’intérieur » et, son tour venu, il dit :

- Le bled.

Deux autres l’avaient déjà dit pour plaisanter mais, chez lui, on sentait que cela venait du cœur : bien, c’était ce que je cherchais, la densité de paroles. Il poursuivit d’ailleurs : « parce que, là-bas, c’est vraiment chez moi. ». 

Le tour de classe se poursuivit, entre belles pépites et mots hésitants.

 

Quand il prit fin, le même garçon me fixait toujours et me demanda :

- Et vous madame ?

 

Sans réfléchir, j’ai répondu :

- Les bords de Loire ; la lumière du soleil irisant l’eau et dansant sur les vieilles pierres… c’est beau !

- C’est là que vous avez rencontré votre copain ?

 

Ca m’a fait sourire.

Il ne pouvait pas savoir – d’autant plus que je n’avais pas « réfléchi » ma réponse – que, pour moi, quand je parle de poésie, je ne sais pas la séparer de Dieu ; comme je ne sais pas séparer Dieu de la poésie ;

Parce que Dieu est le grand poète de la vie ;

Parce que j’ai fait mienne cette belle phrase de Scholtus dans son petit Christianisme d’insolence : « se faire les poètes de la grâce à travers les opacités de la chair » pour en rechercher toujours plus la justesse.

 

Il ne pouvait pas savoir que, sans réfléchir, j’avais parlé de « mon » lieu, de cette abbaye où je viens respirer, souvent,

Me ressourcer, vraiment,

Chercher à toujours mieux grandir et vivre en Lui,

Contrepoint essentiel de silence de mes jours devant et avec eux,

Beauté de la nature à conjuguer avec celle de l’humanité.

 

Oui, ça m’a vraiment fait sourire et j’ai répondu :

- En fait… c’est surtout là que j’ai rencontré le grand amoureux de l’humanité.

 

Je ne crois pas qu’il ait très bien compris,

Mais finalement, je ne crois pas que c’était très important de dire exactement,

Car il y avait déjà eu cet espace d’un frémissement,

Le petit interstice subreptice où Il pouvait dire, écrire, l’au-delà des mots.  

 

lundi, mai 27 2013

Petit caté pratique avec Kaamelott : l’amour du prochain

 

Quand les premiers – hélas si rares – rayons de soleil pointent leur nez, une classe d’élèves mute soudain en une horde incontrôlable et incontrôlée… A tel point qu’après s’être égosillé, le professeur se sent plus ou moins pris d’accès de fureur – qu’il contient fort heureusement pour conserver sa posture magistrale.

 

En résumé, tout cela pour vous dire que, dans une classe, c’est parfois comme dans la vidéo qui suit mais qu’on n’en demeure pas moins humain, qu’on n’en demeure pas moins chrétien.

 

Voici donc une vidéo pour mûrir notre « aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés », même si Seigneur, si Tu savais (enfin, Tu le sais, mais on fait comme si) comme le comportement de Machin m’énerve !!! …

 

… pour toujours travailler son « voyez comme ils s’aiment » en travaux pratiques ! ;-)

 

samedi, avril 27 2013

Esprits en germination

 

 

 

Au fil des mois, voir des esprits se former,  

Grandir et s’agiter ;

Voir des personnalités s’affirmer ;

Sourire à les voir enfin oser se lancer dans une activité d’écriture,

Même toi, le « démissionnaire » !

 

Toi qui sors un stylo une fois sur deux en cours ;

Toi qui me présentes un classeur avec vingt feuilles moches dedans sans complexe ;

Toi qui as décidé que tu étais définitivement « nul » ;

Que tu ne valais rien, que ta place était au dernier rang,

Que ton rôle était d’encourager les autres à ne pas travailler.


Hier, te voir écrire, te voir me lire ta production, pour une fois,

Te découvrir un peu plus dans ce que tu révèles de toi au travers de ces mots décrivant le portrait d’un autre, en tableau.  

« Son air bougon est une carapace de fragilité », disais-tu… Ah.

 

Te sourire encore,

Même si tu ne crois pas en toi.

Te redire que je crois en toi, même si tu ne m’écoutes pas.

 

Si tu savais le Don de Dieu pour toi,

Si tu savais combien je Le vois chaque jour plus vivre pour et en toi…

 

mardi, avril 16 2013

Pronote exegète ?

 

 

 

Les profs ont un super machin sur internet qui s’appelle Pronote qui fait tout, de la saisie de notes au cahier de textes, un peu comme l’iPhone, à l’exception du café un peu comme l’iPhone.

 

Le problème, c’est que, quand on ne s’y intéresse pas durant quelque temps, la connexion saute et nous voilà en dehors du truc.

 

Un peu comme avec le Seigneur : on fait plein de trucs, on ne prie plus trop et pouf, on se met soi-même au dehors alors qu’« on » (comprendre Lui) ne demande qu’à nous accueillir à bras ouverts pour faire plein de trucs ensemble. Qui sont d’ailleurs carrément mieux ensemble qu’avec la seule volonté de nos seuls petits bras.

 

ProNote donc. Ok, la comparaison est un peu trop facile. Il n’empêche, j’ai été déconnectée tout à l’heure. Et là est apparue sur mon écran cette phrase un peu désuète, cette formulation qu’on trouve surtout dans le Nouveau Testament à un endroit pas vraiment anodin.

 

Non pas la première :

« Vous avez été déconnecté(e) »

 

Mais surtout…

« La connexion a expiré »

Et vous savez quoi ? Il faut très exactement trois clics pour se reconnecter.

  

Coïncidence ? Je ne pense pas : voilà de la laïcité positive ! 

Comprendre qu’il faut être connecté(e), qu’il faut sans cesse se reconnecter à chaque rupture parce que cela ne se fera pas sans notre volonté, mais que ce re-clic, c'est la première étape pour se laisser remettre en communion, pour ressusciter ! 

 

Euh, enfin…

Pardon, pardon, pardon : promis, j’arrête la craie.

Bientôt ;-) 

 

  

lundi, avril 15 2013

Le Seigneur, quel kiff ?


Collusion de discussions en mon esprit : une discussion avec un collègue de maths qui aboutit à la décision suivante « c’est décidé, on va traduire la Bible en langage SMS ! » ; une discussion avec un prêtre de ma paroisse sur son sermon de ce dimanche (qu’il ne prêchait pas dans mon église) sur la pauvreté bien connue du français à propos du verbe « aimer » par rapport à d’autres langues… dont le grec biblique, si riche pour lire et comprendre l’évangile de dimanche dernier.

 

1ère question du Christ : « γαπς με πλεον ; » (agapas) à réponse : « Να κύριε: σ οδας τι φιλ σε » (philô)  

2ème question : « γαπς με; » (agapas) à réponse : « σ οδας τι φιλ σε » (philô)

3ème question : « φιλες με; » (phileis) à réponse : « φιλ σε » (philô)

 

Pour comprendre cet abaissement du Christ qui vient chercher Pierre là où il en est : dans son triple reniement ayant comme besoin d’une triple affirmation pour se relever, dans son incapacité foncière à aimer d’agapê mais dans son amour déjà tout de même vraie amitié, affirmée.

 

En français donc, nous n’avons pas cette chance et le dialogue de la traduction liturgique dit simplement « aimer ».

 

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mercredi, mars 27 2013

Sais-tu quel jour on est ?

 

Depuis samedi soir, c’est la Semaine Sainte…

On y entre tout doucement, tout paisiblement, avant le premier coup d’accélérateur de la messe chrismale et demain, d’un coup, le début plus net de la prodigieuse montée, si abrupte bien que préparée, vers Pâques.

 

Et puis demain jeudi, et puis après-demain vendredi…

Ô combien jours saints, ô combien grandes heures…

Demain, les ¾ de mes élèves, les 4/5 de mes collègues ne sauront pas quel jour on est, évidemment. Et, à côté du lycée, je passerai pour ma part une immense partie de mon temps libre à l’église.

Mais je n’ai pourtant pas deux vies : je n’en ai qu’une et j’aimerais qu’elle soit cohérente.

 

Quand on aborde le Triduum, il y a une ivresse grandissante :

Non pas celle du Vin, du Sang, de la Cène – encore que – mais celle qui en découle,

Nan pas la Joie devant la Croix qui est plutôt silence venant nous saisir au plus profond, mais celle qui en découle ;

L’ivresse de l’Amour, qu’on devine à chaque pas, à chaque jour, à chaque heure plus grand,

Qui nous devance, qui nous appelle, qui nous dit :

« Viens, je t’aime ! Ne crains pas la mort, ne crains pas la croix,

Ne crains pas ! J’ai donné ma vie pour que tu vives parce que je t’aime ! »

 

Demain, je ne dirai pas quel jour on est,

Demain, je ne parlerai pas de Toi, mon Dieu,

Car je sais bien que ce n’est pas le lieu.

 

Mais je tâcherai de T’accompagner,

Mais je tâcherai de Te rendre le seul et pauvre témoignage que je puisse ici Te rendre, en essayant de vivre ce que Tu me demandes de vivre, c'est-à-dire Te vivre, 

En tâchant surtout d’être ivre de manière croissante !

 

Selon la méthode copyrightée par Isaïe, chaque matin :

Dieu mon Seigneur m'a donné le langage d'un homme

qui se laisse instruire,

pour que je sache à mon tour

réconforter celui qui n'en peut plus.

La Parole me réveille chaque matin,

chaque matin elle me réveille

pour que j'écoute comme celui qui se laisse instruire.

 

Pour T’offrir chaque matin, chaque heure de ce Triduum

Pour ne rien craindre,

Pour l’orienter tout entier vers Toi !

 

jeudi, janvier 24 2013

De découvertes en apprentissages


J'ai fait une infidélité non seulement à ce blogue mais également à ma casquette de blogueuse en parlant sur "jeunes cathos blog" de celle que j'ai également depuis septembre : celle de prof ! 

Enfin, j'en parle tout de même de temps à autre ici donc pas de grandes surprises pour ceux qui me lisent régulièrement en ces parages mais un petit témoignage sur ce que je vis et découvre au quotidien, avec les élèves et avec le Seigneur ! 

C'est par ici : "Apprendre des deux côtés du bureau" >> 

 

dimanche, décembre 9 2012

Trois mois de liens

 

 

 

Il y a trois mois, je ne les connaissais pas. On m’a donné une liste, enfin trois, de plus de 30 noms chaque et puis voilà, je serai leur professeur de Lettres pour l’année. Débrouille-toi avec, gamine, et puncto.

 

Il y a trois mois, je ne les connaissais pas. Je les découvrais avec autant de curiosité et de crainte mêlée de joie qu’eux-mêmes se demandaient qui étaient donc leur professeur et, surtout, son drôle de caractère. Il y a trois mois, j’apprenais à la bienveillance sans connaissance et je faisais mes premiers pas sur l’estrade[1], pour enseigner, un peu.

 

Cette semaine, il y avait des conseils de classe. Après l’avis général sur la classe, chaque nom d’élève défile sur l’écran, accompagné des notes, des annotations de chacun des professeurs et d’une petite photo dans le coin à droite. Ca m’a fait un drôle d’effet. Parce que, maintenant, avec chacun d’eux, j’ai un petit bout d’histoire partagé. À chaque nom qui apparaissait, j’avais des images qui me venaient en tête, des bribes de paroles… une personne en train de grandir. Parmi eux, il y en a qui m’agacent mais, en même temps, il y a vraiment quelque chose qui s’est lié avec chacun d’eux : et j’étais heureuse de m’apercevoir de cela, dans toute la complexité et l’unicité des relations entretenues avec chacun. Poursuivant ma dangereuse[2] tentative de subversion[3] de la fonction publique, j’ai prié et rendu grâce bien souvent durant ces conseils. C’est beau de travailler via les « humanités » pour faire grandir leur humanité, vous savez.

 

Mais cette semaine, il y a eu autre chose. Cette semaine, j’ai été pour la première fois confrontée à la violence en classe. Oh la violence verbale entre les élèves, c’est un peu mon pain quotidien. Mais cette violence physique, bestiale, vous savez… Cette violence d’un élève qui en choppe un autre violemment pour l’envoyer valser au loin, là, comme ça, devant vous en oubliant que vous existez. C’est impressionnant. C’est choquant. Il fallut en sortir un, jouer au bluff du « W., vous sortez » en y jouant toute son autorité sans savoir s’il y aura de l’effet parce que le W. en question pourrait vous envoyer valser vous aussi. Et poursuivre à l’issue du cours les rapports et autres sanctions. Mais le pire, ce n’était pas de le sortir cet élève, c’est l’effet que cela provoque. Après cette violence, tout le monde était amorphe, sans vie. Les élèves comme moi-même. On constate que la violence n’existe pas seulement pour elle-même, elle rompt quelque chose. Elle vient casser les liens d’humanité qui ont pris trois mois à se tisser, qui sont fragiles : elle ramène chacun à sa part de bestialité et non pas à ce que chacun possède de plus grand, de plus beau. De ce qu’on leur demande de faire grandir, pour aller au-delà. J'avoue être encore sous le coup de ce bris inattendu.

 

Être prof, c’est sans doute enseigner, oui, c’est notre mission première,

Mais, avec ces trois mois, avec cette semaine, je m’aperçois que c’est aussi être au cœur de tous ces liens humains,

Liens qu’il faut aider, en humble tisserand, à tisser, retisser, inlassablement, sans cesse…

Que je continue, inlassablement aussi, à Lui confier.

 



[1] … quand il y en a une.

[2] Je n’exagère même pas car, selon Jean Sulivan, la prière est « l’acte révolutionnaire par excellence, le contraire de l’aliénation »… alors, c’est dire ! ;-)

[3] En d’autres lieux, on parle de « conversion », mais vous aurez compris l’idée. 

mercredi, novembre 14 2012

C’était un élève de mon lycée


 

Le petit papier blanc était là, ce matin, épinglé sur le tableau d’affichage de la salle des profs. Négligemment, comme n’importe quelle info pratique, syndicale ou que sais-je encore.

 

Et c’est machinalement aussi que je jetai un œil dessus pour recevoir un choc.

 

Il y était question d’un élève, d’un élève que je ne connaissais pas, d’un terminale d’une section dont je n’ai pas d’élèves en cours mais que la réputation précède.

 

Cet élève-là annonçait le petit papier blanc s’était suicidé durant les vacances de la Toussaint.

 

Le petit papier était d’un laconisme rare. « Il en a eu assez d’affronter la vie » portait-il en guise d’explication avant la signature de notre direction.

 

Choquée, je suis restée devant, bloquée quelques instants, car, devant l’horreur, non, cette annonce ne me suffisait pas...

 

Immédiatement, j’ai prié pour cet élève,

J’ai prié pour sa famille,

J’ai prié pour sa classe et pour ses professeurs.

Je crois que mes collègues qui passaient par là m’ont regardée bizarrement à rester immobile ainsi devant le tableau mais je m’en foutais : l’urgence-là, la seule, à mon sens, c’était de prier.

 

J’ai prié aussi et je continue à le faire pour la direction de l’établissement où j’enseigne tant la phrase explicative m’a fait de mal : « affronter la vie » ? La vie ne serait-elle que lutte désespérante ?

Où est le sens de ce que chacun, membre de cette « communauté éducative », essayons de bâtir jour après jour ?

De bâtir avec de l’humain, c’est-à-dire avec de la fragilité et tout autant de richesses, quelles que soient nos croyances ? Comment peut-on faire ce métier sans un minimum de foi en l’homme, en la vie ? Cela fait partie des questions qui vivent en moi depuis la rentrée…

 

Mais là, aujourd’hui, pas question d'ergoter : je n’ai su, je n’ai pu, que prier.

 

Seigneur, fais de chaque membre de cette communauté que nous formons des amoureux de la vie, tellement transpirants de vie que capables d’en donner un peu la saveur à nos élèves, à ces jeunes ados souvent si mal dans leur peau et pourtant si pleins de promesses. 


Amis, priez s’il vous plaît avec moi, pour tous ceux qui enseignent, qu’ils donnent à chacun en plus d’un solide bagage pour s’y engager, d’aimer cette vie et de le transmettre, cet amour, par leur enseignement.

Et, surtout, priez avec moi je vous prie pour cette jeune âme partie tôt vers le Père ; et pour sa famille. 

vendredi, novembre 9 2012

Par correction, quelques considérations


 

Qui dit vacances dit, pour les profs stagiaires encore naïfs et imprévoyants, un premier énorme tas de copies à corriger, façon grande montagne prête à déferler façon avalanche.

 

Forcément, quand on sort de l’université et malgré tout son enthousiasme de jeune prof, si l’on rit bien souvent, l’on est surtout rapidement catastrophés par le niveau des copies…

 

Très vite et surtout quand les corrections s’annoncent fort longues, on a envie de faire cette pseudo-prière si souvent détournée sur le net pour les patrons, les curés ou autres figures d’autorité :

 

« Seigneur, donne-moi la patience car, si tu me donnes la force, je lui pète la gueule ».

 

Et puis l’on se souvient que l’on est chrétien et qu’il faut bien, effectivement, prier pour ses élèves, oui, mais réellement, pas seulement par une blague servant de pirouette à son agacement personnel.

 

Et l'on en vient à prier pour de bon au fil des heures d’aridité, 

A demander au Seigneur la patience, oui, certes, mais surtout la justesse et la justice ;

Lui demander la bienveillance non pas naïve mais empreinte de charité vraie ;

Lui demander de ne pas noter à la tête du client, sur ses bavardages intempestifs ou au contraire sur son grand sérieux habituel ;

Oui, Lui demander la justesse, et la grâce de mettre des commentaires non pas corrosifs mais montrant l’erreur et aidant les élèves qui nous sont confiés à grandir.

 

Bref, il y a de la matière pour prier quand on a le stylo rouge en main…

Et dire qu’on ne me croit pas toujours quand je dis que corriger des copies, c’est du boulot !  

  

jeudi, novembre 8 2012

Harmonies poétiques orantes

 

Longues corrections d’automne de ces non moins longues anthologies poétiques de mes élèves. Des beaux travaux, d’autres moins profonds ou trop désinvoltes mais, toujours et si souvent l’éblouissement devant ce petit miracle que constitue un texte poétique.

 

Et quand l’accord du texte se fait avec celui de notre cœur, il crée une profonde harmonie. Parfois, même, en Lui.


 

« Aucune marche

Aucune navigation

N'égalent celles de la vie

S'actionnant dans tes vaisseaux

Se centrant dans l'îlot du cœur

Se déplaçant d'âge en âge

 

Aucune exploration

Aucune géologie

Ne se comparent aux circuits du sang

Aux alluvions du corps

Aux éruptions de l'âme

 

Aucune ascension

Aucun sommet

Ne dominent l'instant

où t'octroyant forme

La vie te prêta vie

Les versants du monde

Et les ressources du jour

 

Aucun pays

Aucun périple

Ne rivalisent avec ce bref parcours:

 

Voyage très singulier

De la vie

Devenue   Toi. »

 

 

in Andrée Chedid, Poèmes pour un texte.

 

samedi, octobre 20 2012

Méfiance ? Il t’a dit « confiance » !

 

Discussions de fil en aiguille en salle des profs :

Diversité des sujets – même si nombreux sont ceux plus ou moins tabous ; diversité des personnes que l’on y rencontre…

 

Quand on est jeune stagiaire, le principal sujet de discussion, ce sont surtout beaucoup de collègues qui viennent spontanément nous éclairer de leur expérience d’ancien dans le métier.

 

Je reçois toujours avec joie ces conseils, quand bien même je sens qu’ils ne « colleraient » pas avec ma façon d’être, de faire, d’enseigner tant les trois sont liés. On ne peut en effet enseigner qu’avec ce qu’on est, qu’avec qui on est. Mais cela procède d’un vrai bon sentiment, celui d’éviter au jeune impétrant de tomber dans les terribles pièges du métier, si nombreux qu’on a parfois l’impression que le chemin vers le niveau « enseignant à peu près correct » est semé d’embûches ! Alors, j’écoute chacun…

 

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dimanche, septembre 16 2012

Du dialogue interreligieux en lycée public

Laïcité mal digérée dans mon lycée ? 

Que nenni, les ordinateurs de la salle des profs y arborent fièrement l'ouverture à un réel dialogue interreligieux... 

l'écran trait d'union ?
... pardon ! ;) 

vendredi, septembre 7 2012

Prière stagiaire de prof stagiaire

 

Seigneur,

 

Je les découvre… d’ailleurs je découvre tout.

 

Eux, ces élèves, si divers : cet étonnant, ce détonnant mélange de ceux venant de cette ville plutôt bourgeoise où j’enseigne comme ceux venant des villes voisines, très défavorisées.

 

Ces élèves, ces sympas-là avec qui l’enthousiasme est facile tant leur sourire l’est également, quand bien même le niveau ne suit pas forcément.

Ces élèves, ceux-là dont je ne connais même pas encore le son de la voix comme ceux-là qui n’attendent qu’une question pour lever leur doigt au ciel ;

Ces élèves et même celui-là ou encore celle-ci au dernier rang à qui j’ai déjà eu une furieuse envie de dire leur quatre vérités pour leur apprendre ne serait-ce qu’un semblant de politesse à défaut de Lettres.

Ces élèves, tous ces élèves-là, mes élèves depuis quelques jours.

 

Et puis il y a tous ces collègues, ce microcosme lui aussi divers dont je n’ai pas fini de faire le tour, aux rites bien ancrés en salle des profs autour de la machine à café : de la syndicaliste toujours prête à vous soutenir à l’artiste rêveur les yeux perdus au loin qui ne vous parle qu’en poèmes, il y a une richesse humaine formidable que je ne me lasse pas de découvrir.

 

Là-bas, je n’ai pas franchement le droit de dire que je crois en Toi, que Tu es Celui qui accompagne mes journées et même toute ma vie. 

Pourtant ma croix frappe toujours aussi fort contre ma peau, mais sous ma chemise ;

Et pourtant, j’y prie aussi entre deux : courts instants volés, courts instants donnés... 


Mais, depuis la rentrée, je Te prie pour eux aussi comme pour moi ;

Je te demande de me donner Ton regard sur chacun de ceux que je côtoie,

Pour que ma vie sache leur révéler un peu, ne serait-ce qu’un tout petit peu, combien ils sont aimés !