Zabou the terrible

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Mot-clé - pauvreté

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vendredi, novembre 22 2019

Quelques minces considérations sur la pauvreté

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        La pauvreté, conseil évangélique. Nous, vierges consacrées, ne prononçons pas ces trois vœux ou conseils mais, si nous engageons explicitement à vivre dans la chasteté (déjà tout un programme de vie quand on la considère en son sens large !), nous nous engageons aussi à « suivre le Christ » (sans doute encore davantage tout un programme !) et l’on a tendance à dire que les conseils évangéliques sont inclus dans cette sequela Christi. C’est vrai et cela est encore plus global puisqu’en réalité ces deux éléments ne font que dire, d’un simple oui : « je m’engage à apprendre à aimer tout au long de ma vie, jusqu’à la mort ».

 

         Mais considérons néanmoins la question de la pauvreté : vivant dans le monde, devant assurer notre quotidien, ses vicissitudes et ses impôts, il s’agit en gros d’une simplicité de vie qui prendra différents trains de vie selon les lieux, les circonstances diverses des unes ou des autres. Il est cependant bon de faire le point, de temps à autre, si possible avec un père spirituel, pour voir où nous en sommes dans notre rapport avec les biens matériels. À quel moment les transformons-nous en idoles qui tendraient à prendre la place d’un Dieu que nous nous sommes engagées à aimer plus que tout ? Peut-être aujourd’hui cette dimension prend-elle un sens plus brûlant dans le contexte de la crise écologique et nous invite-t-elle également à chercher à enlever de nos vies ce qui est surconsommation : c’est en tout cas une dimension qui va devenir chaque jour plus prégnante. Ces deux questions sont valables pour chacun, bien en dehors de la vie consacrée, puisqu'il s'agit bien d'un "conseil évangélique" destiné à tous. 

 

           Si cela est juste et bon, je me demande toutefois de plus en plus si la tension la plus profonde de ce conseil évangélique ne se trouve pas la réalité de notre pauvreté. Oh oui, nous sommes pécheurs et rien de neuf sous le soleil là ! Certes et c’est en plus facile à dire mais peut-être moins à réaliser pour de bon, en mettant toute la réalité de notre être face au Seigneur. Mais il y a aussi toute cette réalité existentielle de notre pauvreté : la non-maîtrise des événements ou encore le vide parfois apparent et déstabilisant de nos prières. Qu’en faisons-nous justement dans notre prière ? Restons-nous fanfaronnants de force, habitués, rodés de fidélité, ou osons-nous, simplement, venir comme nous sommes à la prière, comme une branche venant prendre sa sève vitale, dépendante intimement de la solidité qu’est le tronc, le corps du Christ ? Cela est pauvreté mais cela est aussi vérité.

          J’y pense souvent depuis la rentrée avec cette fameuse classe compliquée dont je suis professeur principale : je suis vive, j’aime l’action, j’ai un besoin certain de bouger pour changer les choses alors pour tout vous avouer je râle souvent devant le Seigneur en même temps que je Lui confie mes élèves. Des améliorations en vue ? Tellement minimes... mais et si Dieu m’appelait tout simplement à me reconnaître ainsi pauvre devant Lui venue simplement avec toute ma pauvreté ?

            C’est bien cette incroyable sève de vie de la relation avec Lui qui donne d’être une branche vivace, apte à porter des feuilles vertes, des fruits ou, même quand elle devient suffisamment solide, des oiseaux qui viennent s'y reposer. Alors embrasser la pauvreté est probablement d’accepter cette dépendance vitale intérieure.

            Peut-être alors que nos pauvretés existentielles deviennent ces deux pièces de la veuve que saint Luc faisait résonner juste avant la pericope que nous entendions dimanche dernier (Lc 21), juste avant l'annonce de la destruction du Temple. De ces pièces il ne restera probablement rien... mais il y aura été mis beaucoup d’amour et c'est cela qui importe plus que tout, et c'est cela qui transforme tout. 

          Que le Seigneur qui a pris notre chair jusque dans ce qu’elle avait de fragile nous donne chaque jour davantage de nous reconnaître pour ce que nous sommes devant lui, dans nos faiblesses et nos vulnérabilités

lundi, novembre 11 2019

Hors-normes

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L'on m'avait dépeint ce film comme un "Intouchables"-bis. A part la thématique du handicap, prégnante dans les deux, je ne vois vraiment pas d'autre lien et encore s'agit-il ici de l'autisme et non du handicap physique. Certes, les réalisateurs des deux films sont les mêmes mais ce n'est pas cela qui est marquant. 

En revanche, ce qui est certain, c'est que l'un et l'autre font du bien parce qu'ils montrent des réalités qu'on a tendance à cacher - dans une société aimant les corps beaux et bien portants, où les rêves technologiques s'écrivent en allongements espérés de vie - ou à ne pas voir parce que notre regard accroche sur ceux qui sont différents. 

Alors, oui, il est bon de passer du temps en compagnie de ceux qui souffrent de l'autisme et de ceux qui s'efforcent, parfois difficilement, de les aider. Ici, deux éducateurs s'entourent de jeunes des cités pour aider et ce sont vraiment deux mondes problématiques qui se rencontrent et qui, l'un et l'autre, d'un pas mal assuré, vont de l'avant ensemble. Cela est beau d'entraide, d'humanité et d'espérance malgré tout ce que le film montre de violence et c'est à voir, vraiment. 

Pourtant, ce qui a le plus marqué mon regard de professeur en zone sensible, ce n'est pas tant le handicap mais bien la question de l'inspection d'une des associations qui traverse le film : pas d'agrément, alors, sont-ils aptes à aider ? C'est le cas dans la plupart des pauvretés aujourd'hui. On plonge dans le drame d'une administration française parfois trop absurde, avide de papiers, tandis que la société est malade d'argent. C'est la lutte trop souvent aveugle entre le désir du profit et l'humain délaissé, et l'individu laissé pour compte. Où l'on manque de moyens et où il ne reste que l'humain, on vient demander des normes, des objectifs, des choses bien carrées alors que le quotidien s'écrit en lettres vraiment minuscules mais il s'écrit et c'est cela l'important, non par des normes mais par des hommes et des femmes qui s'engagent pour la vie des autres, parfois portés par leur foi comme le montre en filigrane ce film. 

samedi, octobre 19 2019

Une histoire de coeur et de partage

Dans le magazine Vocations de l'Oeuvre des vocations (voir le site : mavocation.org), ce mois-ci, un sujet qui me tient spécialement à coeur et auquel on n'est jamais suffisamment sensibilisé il me semble. Petit partage donc : 

 

 

 

 

 

mardi, octobre 8 2019

Traduction OR - Et vous madame, est-ce que vous croyez en moi ?

Aujourd'hui est paru dans L'Osservaro Romano, le journal du Vatican, un petit article de ma part témoignant de ma rentrée, pour toute une série de leur part sur l'école et l'éducation. On peut le trouver en italien donc ici sur le journal complet ou encore sur l'article spécifique.  

 

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            Encore une rentrée. Une rentrée ordinaire ? Oui et non car un enseignant ne peut jamais s’habituer à la rentrée : il y a de nouveaux visages à découvrir, d’autres élèves, c’est-à-dire d’autres êtres en croissance qu’il va falloir aider à grandir et c’est toujours neuf, comme un défi à relever. Le mélange d’excitation et de stress qui nous habite les jours précédant la rentrée est assez caractéristique : saurons-nous non pas continuer mais bien commencer à nouveau cette année ? Avec un regard si neuf qu’il porte l’espérance chez ceux sur qui il se pose ? Pour moi, professeur de Lettres dans l’enseignement public, cette rentrée marquait aussi le passage dans un nouvel établissement, du collège au lycée mais qui n’est pas un grand déménagement puisqu’il se trouve dans la même zone de cette banlieue dite pudiquement sensible dans laquelle j’enseigne depuis six ans. Je n’ai pas choisi d’y être envoyée mais, touchée par ce que j’y ai découvert, j’ai décidé d’y rester. 

 

            Ici, la pauvreté, matérielle ou humaine, est fréquemment présente, parfois de manière cachée : il faut simplement gratter les apparences pour la voir apparaître. Tel élève n’a pas de famille, cet autre vient arrive toujours en retard mais c’est parce qu’il vient de chez son parent qui habite loin, tel encore est en situation de souffrance. Et il faut faire cours dans ce contexte trop souvent lourd qu’ils apportent avec eux : si ces soucis viennent de dehors, on ne peut leur demander d’en faire totalement abstraction. Je crois qu’il s’agit pour chacun de nous, enseignants, de rester présents et de savoir donner généreusement de notre temps dans des relations interpersonnelles, à leur écoute. 

 

Un problème dramatique ici est la quasi-absence de mixité sociale, notamment sur le plan culturel : comment montrer autre chose aux élèves que ce qu’ils côtoient au quotidien ? C’est l’importance pour moi des sorties scolaires, grandes ouvertures sur le monde, mais, sans changement sociétal réfléchi, cela ne peut aller loin. Comment favoriser une culture de la rencontre et non la ghettoïsation actuelle, aggravée par l’individualisme moderne ? Selon que votre banlieue sera riche ou misérable, votre établissement aura une réputation favorable ou bien minable. Cela a aussi des conséquences très pratiques sur la manière de faire cours : mes évidences culturelles ont dû faire place à de longues périphrases pour expliquer certains textes. Et j’avoue ne jamais être aussi heureuse que lorsque mes élèves comprennent enfin une œuvre en se l’appropriant avec leurs mots, parfois fleuris : la barrière de la compréhension a été franchie, on peut alors avancer et faire savourer la beauté d’une langue. 

 

En banlieue française fortement marquée par la présence de jeunes issus de l’immigration, la place des filles se pose également de manière cruciale : beaucoup se sentent en effet limitées par le poids culturel dans le choix de leurs études alors qu’elles sont d’une grande intelligence. Comment leur laisser les mêmes chances, les mêmes ouvertures qu’à leurs collègues masculins ? Il y a tout un travail de sensibilisation, ne serait-ce que pour les aider à croire en elles et je me rappellerai toujours de cette élève qui, un jour, s’était effondrée en larmes devant moi en me questionnant : « et vous, madame ? Vous croyez en moi ? ». Enfin, de manière plus large, dans l’ensemble de la France, la réforme du bac et du lycée laisse aussi augurer de nouveaux défis dont il va falloir apprendre à se saisir : les filières ont été supprimées au profit de choix de spécialités pour permettre des parcours normalement plus personnalisés. Cela sera-t-il le cas ? Le temps seul le dira. 

 

            Mon travail est d’être professeur mais mon être profond est tout au Seigneur comme vierge consacrée. L’insistance du pape François sur la joie me marque beaucoup : « Là où il y a des consacrés, il doit y avoir de la joie » a-t-il martelé à plusieurs reprises. C’est très vrai. Alors, je crois qu’il s’agit également d’une part essentielle de ma mission : diffuser cette joie profonde que donne l’amour de Dieu parce que, je le crois, mes élèves sont aimés eux aussi. C’est l’humble fidélité du quotidien, les manches retroussées pour servir, et c’est ma joie. Et ce métier de professeur, qui est aussi vocation, en devient alors à chaque rentrée plus rayonnant : il s’agit d’aider, chez nous par notre prière, en classe par notre témoignage et par notre proximité à tous, à faire signe vers un Amour plus grand, qui précède chacun. 

lundi, août 19 2019

Un feu qui brûle, une eau qui lave, un feu et un baptême qui réunissent

 

 

 

C’était l’épisode de la mini-série « Sacristie » de la semaine dernière mais j’y ai pensé ce matin tant il pouvait bien correspondre à l’évangile de ce dimanche qui parlait de « divisions » et, en même temps… ne parlait-il pas d’union, comme dans cet épisode également ? 

 

En effet, Jésus y disait aussi « Je suis venu apporter un feu sur la terre, et comme je voudrais qu’il soit déjà allumé ! Je dois recevoir un baptême, et quelle angoisse est la mienne jusqu’à ce qu’il soit accompli ! » On sait où ont puisé les inoubliables paroliers de la chanson française Charly et Lulu pour leur puissante chanson : « Le feu ça brûle et l’eau ça mouille ». 

 

Car le feu brûle, le feu purifie ;

Car l’eau vive polit, l’eau nettoie. 

C’est au feu qu’on vérifie l’or dit l’épître de saint Pierre ; 

C’est dans l’eau qu’on lave les plus belles choses pour qu’elles rayonnent. 

 

            Si le feu blesse dans un premier temps, une fois qu’il a pris, il se répand comme naturellement : cela n'est-il pas la même chose quand il enflamme un coeur, puis d'autres, de proche en proche ? 

          C’est autour d’un feu qu’on aime se retrouver amicalement alors quelle possibilité de communion si les cœurs brûlent de Lui ! 

          C’est autour de l’eau qu’on vient s’abreuver, qu’on vient même parler mariage dans la Bible si souvent, alors quelle possibilité de communion si nous savons vivre de l’eau vive de notre baptême ! 

          C’est aussi dans la redécouverte de nos fragilités respectives, comme dans cette vidéo, qu’on retrouve ce qui est le plus pur, le plus vrai, le plus nous-mêmes de nos vies… et que Dieu s’y révèle, sans fard, en nous aimant jusque-là et en nous donnant d’y aimer vraiment, en laissant tomber toute la superficialité de nos divisions, pour avancer au large de l’amour. 

 

jeudi, mai 30 2019

Ascension ou le Kairos qui débloque

 

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            Je ne sais pas vous mais, moi, à l’Ascension, j’ai toujours l’impression de quelque chose de discordant. Paf, Jésus part et, paf, on doit attendre 10 jours encore l’Esprit Saint : c’est embarrassant au possible, on ne sait pas bien où se mettre, on ne sait pas trop comment prier. Vous me direz qu’on commémore, certes, mais l’année liturgique nous est aussi donnée pour accompagner Jésus afin de mieux, nous-mêmes, Le suivre et je suis très liturgico-sensible sur ce plan-là. 

 

            Alors, on le suit au ciel ? C’est ce qui est promis… mais en espérance. Il y a là quelque chose d’un kairos,[1]d’un moment favorable qui gratte, qui dissone, qui discorde. 

 

            Ce qui est bien à l’Ascension, c’est qu’on assume pleinement l’embarras dans les textes liturgiques : la première lecture des Actes des Apôtres nous offre le laps de temps de manière claire et pas l’évangile qui montre Jésus accompagnant pleinement ses disciples jusqu’à la fin et, simplement, leur faisant une promesse et ne cessant en même temps de les bénir : « Et moi, je vais envoyer sur vous ce que mon père a promis ». 

 

            Il s’agit d’entrer dans le kairos de la promesse : si nous avons choisi à qui nous fier, il n’y a plus qu’à croire à Sa promesse. Il n’y a plus à regarder le ciel, il y a à retourner où nous sommes et à vivre dans Sa bénédiction. 

 

L’Esprit est la promesse de Dieu : nous avons dix jours offerts pour grandir dans la foi. Dix jours pour mieux faire confiance et vivre, simplement, de et dans cette bénédiction de Dieu. Dix jours pour, alors, être revêtus de la dunamis, de la force de Dieu qui nous poussera hors de nos villes et de nos temples, hors de nos habitudes, hors de nos routines pour témoigner de Lui. 

 

 

 

P.S. : Désolée du peu de mises à jour récentes de ce blog mais le mélange travail + voyage scolaire + études fut particulièrement prenant du côté de mon cerveau ces dernières semaines. J’ai pourtant pas mal de choses à y dire, voire à en dire ! 

 

[1]Petit dieu du moment favorable à ne pas laisser échapper dans la mythologie. 

vendredi, février 22 2019

De l’accès au langage, de l’accès à l’amour

 

L’enfant nouveau-né braille au moindre besoin, presque sans raison : il ne sait pas encore exprimer ce dont il a besoin. 

 

L’enfant des banlieues, souvent, trop fréquemment, n’a pas les mots, n’a pas les codes : il a les insultes, il a les poings. 

 

La communauté qui n’est pas encore suffisamment libre ou qui ne se parle plus, quelle qu’elle soit, se met à murmurer ainsi que le peuple hébreu au désert, à médire les uns vis-à-vis des autres : elle n’a plus accès à la communication. 

 

Car il ne s’agit pas seulement d’accéder au langage, 

Il s’agit d’accéder à la parole, la vraie, et d’apprendre à entrer en communication avec l’autre : 

Liens à tisser et à retisser sempiternellement.

 

Mais la communion précède parfois cet échange si fructueux : 

Témoin l’enfant nouveau-né, si fragile qu’il ne saurait exister sans se blottir dans les bras de ses parents, ces derniers cherchant à précéder ses besoins… Car entre eux existe l’amour. 

 

Et pour les autres ? 

Pour les jeunes, il faut leur apprendre à se servir des mots, inlassablement : rôle éducatif ; 

Pour tous, il faut saisir le moindre petit pas vers la communication, vers une communion, par des gestes bienveillants et, surtout, par ce fameux « regard qui espère », même quand tout semble foutu : rôle de la petite fille Espérance, rôle de chacun qui accepte de veiller à cette aune ; 

Parce qu’entre nous tous doit exister aussi une forme de ce même amour, en responsables de nos frères que nous sommes. 

 

 

dimanche, février 10 2019

Chronique des JMJ de Panama 1,5 Relevés !

http://www.patrimoine-culturel.gouv.qc.ca/rpcq/document/rpcq_bien_116858_44630.JPG?id=44630

Ceci n’est que la chronique 1,5 et non la 2 tant elle a à voir avec la première

 

            Aujourd’hui dimanche 10 février, c’était le dimanche de la santé et, dans de nombreuses paroisses était proposé le sacrement des malades. C’est un magnifique sacrement qui vient donner la force du Christ dans la faiblesse, quelle qu’elle soit. 

 

            Eh bien, justement, ce sacrement, c’était un peu notre innovation diocésaine de ces JMJ… à voir ces h-amis, à les voir rayonnants et souffrants, à écouter certains autres dans leur(s) souffrance(s), à entendre une homélie y faisant référence lors d’une messe unique célébrée sur un bateau voguant dans l’océan pacifique, nous nous sommes posés la question progressivement : et si… ? Et pourquoi pas le proposer finalement ? 

 

            Il fallait former, informer et voir si, concrètement, nous avions ce temps de formation puis un temps de célébration. Au fil des jours, les obstacles tombaient et les plages horaires semblaient évidentes : un topo à l’arrivée à Panama Ciudad, un petit temps d’accueil et d’accompagnement par un des prêtres présents pour les volontaires et un sacrement finalement célébré lors d’une messe diocésaine juste avant de partir pour le week-end avec le pape. 

 

            Nous pensions certes à nos h-amis mais ce ne furent pas les premiers à se manifester et ils ne vinrent pas tous : 6 jmjistes de notre groupe reçurent ce sacrement. Les blessures invisibles sont aussi le lieu où Dieu veut venir apporter sa puissance de vie et c’était beau de voir ce mélange inattendu et confiant de jeunes osant, avec simplicité et humilité, présenter leur souffrance à la prière de tous. Ce fut un très beau moment, très fort, très priant, très enthousiasmant même avant de rejoindre la foule du week-end final et de nous laisser enseigner par le pape et de prier avec lui. 

 

            Car, que cela soit ce week-end comme aux JMJ, n’oublions pas que le Christ vient toucher pour que la personne malade, pleinement membre de Son corps, porte spécifiquement Son amour salvateur en elle. D’ailleurs, dans la Bible, c’est tellement fort que les guéris ne peuvent s’empêcher d’aller ensuite proclamer les merveilles de Dieu ! Le corps blessé des malades mais ainsi oint est en effet le lieu où vient s’ouvrir une relation privilégiée avec le Seigneur : à nous de ne pas les abandonner mais bien au contraire d’entrer en relation avec ces personnes pour nous laisser aussi entraîner par elles, à leur exemple : pour que les chemins parfois improbables de chacune de nos vies soient, ainsi que Lui le désire, toujours davantage chemins de Vie. 

 

 

 

 

jeudi, février 7 2019

Chronique des JMJ de Panama 1 Des H-amis et des frères

 

 

            Je suis donc revenue du Panama, le cœur profondément en action de grâce… mais la reprise du rythme quotidien est rude n’ayant pas bénéficié d’un vrai temps de repos, voire de transition avec l’ordinaire des jours. En résumé, les vacances se font très largement attendre ! Mais la reprise du tempo passe aussi sans doute par se redonner un rythme d’écriture, ici et plus personnel ailleurs. Alors, je commencerai par partager quelques éléments des JMJ. 

 

            57 personnes bien parties puis bien arrivées au Panama : soulagement et étrange sensation pour moi de voir un projet sur lequel on est depuis presque 2 ans enfin prendre forme et, surtout, prendre chair. 

 

            Car il s’agit bien ici de chair : des jeunes en chair et en os d’une part et, parmi eux, cinq jeunes tout spécialement à la chair blessée, meurtrie de manière visible, dans le handicap physique. Emmener les quatre parmi eux possédant un fauteuil avait été une vraie question : si les indicateurs logistiques étaient assez mauvais, il faut bien le dire, l’indicateur de leur foi et celui de leur envie étaient au plus haut. Ce n’était pas simple : il a fallu discerner et chercher à organiser au mieux ce qui pourrait se construire éventuellement. J’ai beaucoup prié quand il a fallu dire oui ou non… mais l’Écriture me donnait une réponse : Jésus, Lui, ne laissait jamais personne sur le bord du chemin, au contraire, c’est toujours vers eux qu’il préfère aller. Alors, tant que ce n’était pas utopique, tant qu’on pouvait raisonnablement accueillir, y avait-il une vraie raison de ne pas le faire ? Le manque de dispositifs locaux n’était certainement pas une raison suffisante : nous nous sommes lancés. 

 

            Sur les conseils des plus habitués d’entre eux aux JMJ, nous avons mis en place un système d’anges gardiens pour chacun. Et, dès les premiers jours, quelle joie de voir que « cela prenait » ! Non pas seulement quelques-uns autour d’eux mais bien, très vite, tous, les uns autour des autres ou plutôt les uns avec les autres. Car, s'il n'y avait pas les adaptations matérielles, il y avait les bras, il y avait les coeurs. Sans concertation, tout le monde s’est approché, a voulu aider, a voulu faire partager tel moment avec un tel en le plongeant dans l’océan avec nous ou en lui faisant vivre un bain de foule dans la liesse d’un stade… Bien souvent, mon regard quelque peu scrutateur de déléguée diocésaine s’émerveillait et me faisait dire : « que c’est beau ! Qu’ils sont beaux ! ». 

 

            Quand la fragilité est visible, chacun est aussi invité à faire tomber le masque devant les siennes plus intérieures, à fuir les faux-semblants pour vivre, agir et partager en vérité. J’ai été marquée de voir à quel point cela a été le cas et qu'il s’est créé une ambiance de bienveillance tendant à une communion la plus profonde. En particulier grâce à ces h-amis (on m’a soufflé le terme comme celui qui se disait dans certains mouvements : c’est mieux que nos amis handicapés), nous avons expérimenté la fraternité. C’est ce qui a d’ailleurs fait dire au curé d’une de nos paroisses d’accueil que ce groupe était une « catéchèse vivante » ( !!!). 

 

De ces JMJ, je suis rentrée le cœur profondément réjoui de me dire à quel point les fragilités sont les brèches dans lesquelles Dieu aime s’engouffrer pour y révéler Sa lumière et, partant, pour davantage faire de nous Son peuple. 

 

P.S. : Cette photo qui a fait le tour de la planète ne vient pas de notre groupe... mais nous avons fait pareil le week-end final avec nos h-amis et notamment l'une d'entre elles a été bénie... incroyable moment d'émotion ! 

https://fr.zenit.org/wp-content/uploads/2019/01/Personne-handicapée-JMJ-de-Panama-©-Twitter.png

La preuve... 

 

 

 

 

 

jeudi, décembre 20 2018

Sur un aubergiste fameux

Lorsque Joseph lui avait demandé une place, c'était vraiment trop ! Il avait répondu, avec l'air agacé qu'ont parfois les personnes fatiguées : "Il n'y a plus de place ici, jeune homme ! Mettez-vous, si vous le voulez, dans mon étable à l'entrée du village : pour une nuit ou deux, cela devrait aller..." Pouvait-il deviner qui frappait à sa porte ? Comme tant d'autres, il croyait que Dieu avait le visage de ses rêves. 

P. Raphaël Buyse, Lueurs de Noël - contes inspirés de l'Evangile, Salvator, 2018

dimanche, novembre 11 2018

Si haut que soit le Seigneur

 

Évangile du jour, Jésus et la pauvre veuve aux deux pièces. 

 

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Dans la foule bruyante, faisant tinter les nombreuses pièces dans le trésor du temple, à la manière d’un don Salluste, Jésus distingue non pas qu’il en manque une mais une femme, celle qui doit à peine oser glisser sa maigre participation.

 Et pourtant, il la distingue, elle, la solitaire peu considérée, il va même jusqu’à distinguer son geste et surtout son cœur qui y préside : ce cœur prêt à tout donner pour le Seigneur. 

« Si haut que soit le Seigneur, il voit le plus humble » (Ps. 137) 

Pour le Seigneur, pas besoin de triompher en hauts faits, 

Pas besoin d’actions éclatantes, d’actes de bravoure ou de charités qui claironnent ; 

Pour le Seigneur, il y a juste à glisser, pièce après pièce, 

Juste à donner, toutes ces choses qu’on croit essentielles ;  

Il y a, peu à peu, ayant creusé ce qui n’était que notre carapace de superficialité, 

à Lui livrer avec confiance notre essentiel 

Pour qu’il soit, Lui, l’essence(vers le)-ciel, 

Notre Essentiel. 

 

samedi, février 17 2018

Dans le secret de Son cœur

 

Pas de billet… mais alors, pas là pendant le Carême ? Si, je préfère chercher à christianiser mon usage de l’internet plutôt qu’en supprimer l’accès, mais en voyage scolaire au début de ce temps : au loin, dans la belle Andalousie, carrefour de la rencontre des cultures juive, musulmane et chrétienne, lieu où apprendre à mieux connaître celui qui diffère de moi.

 

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Et, durant ce temps, entrer en Carême pour la consacrée que je suis. Comment ?

Un temps, j’ai envisagé de jeûner comme l’Église le demande, comme je le fais habituellement, mais, avec 48 adolescents compliqués à gérer autour de moi, j’y ai renoncé : cela aurait été contraire à la plus élémentaire des prudences que ne pas chercher à être la plus en forme possible, pour mieux servir.

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Aller à la messe ? Mais quand aurais-je pu ? Certains m’avaient dit avant le départ que c’était facile : ils ignorent ce que c’est qu’accompagner un groupe hors pèlerinage chrétien. Alors, avant de partir, le samedi matin précédent, j’avais demandé à recevoir l’eucharistie hors messe comme pain et force de la route pour toute une semaine sans messe et j'en gardais le souvenir dans mon cœur, comme un trésor précieux. 

 

Entrer en Carême ?

Il ne me restait que le plus ordinaire de mes jours pour entrer en Carême bien pauvrement.

Ces jours qui ressemblaient parfois à des Cendres tant l’adolescence est un âge de construction souvent ingrat, souvent compliqué. Mais je sais bien que la finalité du Carême, c’est de mieux découvrir, sous ces Cendres imposées sur nos fronts au début de ces quarante jours, le feu de l’amour de Dieu.

Alors, tout mercredi, sans ces cendres, j’ai tout de même cherché à découvrir le feu de cet amour dans le cœur, dans la vie et dans les réactions parfois houleuses de ces ados qui nous étaient confiés. J’ai cherché à Le découvrir « caché au creux du monde comme un feu, puisqu’Il est avec nous ».

 

« Choisis en toute sécurité l’amitié du Christ. Il veut que tu Lui donnes l’hospitalité : fais-Lui un lieu (ps. 131, 5). Qu’est-ce que cela signifie : ‘fais-lui un lieu’ ? Ne t’aime pas toi-même ; aime-Le, Lui. T’aimer toi-même, c’est Lui fermer la porte. L’aimer, c’est la Lui ouvrir ».

(Saint Augustin, commentaire du ps. 131)

 

Exercice du regard, exercice du cœur, exercice de la prière : pour apprendre à mieux Le trouver pour mieux L’accueillir.

 

Mercredi des Cendres de pauvreté et de simplicité ;

Début de carême dans le secret de mon cœur,

Parce qu’Il est présent, agissant, aimant dans le secret du cœur de ces ados…

Ces ados aussi présents que toi ou moi, dans le secret de Son cœur.

 

Bon chemin de Carême à tous,

Tournés vers la joie de Pâques qui illumine déjà tout !

 

lundi, décembre 25 2017

Noël jusque-là

 

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Bonjour au directeur du lieu, digicode, « elle vous attend » dite par l’infirmier puis quelques échanges de « joyeux Noël » avec les divers membres du personnel avant de la retrouver, dans ce lieu où le temps ne poursuit plus tout à fait sa route habituelle.

 

Nous dire bonjour, nous embrasser, me demander intérieurement si elle connaît encore mon prénom et quel est le lien de parenté qui nous unit. Je ne pense pas… Elle sourit toutefois toujours en retour.

 

Quelques échanges de banalités, entrecoupés par celle-ci qui répète « assurément » et qui veut absolument s’installer auprès de nous, par les sortes de râles de celle-là et par l’apathie généralisée de ceux qui ne savent plus, qui semblent avoir oublié ce que c’était que vivre. Il y a aussi celle-ci qui s’est endormie recroquevillée dans un coin.

 

Certains savent encore parler, d’autres ont oublié même la manière de se déplacer… Le luxe et la chaleur du lieu ne parviennent pas à en camoufler parfaitement l’horreur : que reste-t-il de ces vies ? Et pourtant… ils vivent ! Je ne sais jamais comment appréhender cet endroit tant je ne le comprends pas, tant logiquement que spirituellement. Je sais juste combien j’en sors le cœur plein de prières.

 

Elle, à part cette mémoire qui s’envole de plus en plus, ça va plutôt bien du côté moteur tout comme pour profiter de la vie d’ailleurs : elle se croit dans un restaurant, pourquoi pas. « Je ne les connais pas bien, je ne sais pas comment c’est chez eux, je n’ai jamais réservé ici » : moi non plus pour tout t’avouer ! Mais je sais que tu gardes ton goût pour le bon champagne et que tu seras heureuse d’en boire une flûte !

 

Les soignants l’appellent « gentille dame » : j’apprends que c’est ainsi qu’elle appelle tout le monde pour camoufler ses oublis… Alors les soignants se sont aussi mis à l’appeler « gentille dame » : j’aime bien, cela va bien avec sa personnalité. Une gentille dame.

 

Elle, ma mère et moi sommes placées dans le petit salon télé pour être plus au calme pour notre déjeuner de fête : c’est encore l’heure de la messe télévisée. Je ne sais même pas si cette pratiquante régulière de toujours sait encore ce que c’est que la messe tant ses propos sont incohérents. Nous écoutons d’une oreille.

Et puis, il y a ce chant final bien connu de Noël avec ce fameux refrain aux tant de o : et c’est avec surprise que je l’entends, elle, ma grand-mère chantonner les Anges dans nos campagnes sans se tromper dans les paroles. Ancrage d’une vie… ? Je suis touchée de voir qu’elle s’en souvient : est-ce de la mémoire à long terme ou ce qui t'a marquée plus profondément que tout ? 

S’ensuit la bénédiction Urbi et orbi précédée d’un court commentaire disant que celle-ci venait spécialement rejoindre les malades et les personnes isolées. Eh bien, moi, dans cette unité Alzheimer, à entendre la bénédiction du pape venir se poser jusque sur tous ces gens qui ne le savaient même plus, j’ai écrasé une larme.

Oui, c’est Noël aujourd’hui et c’est bien jusque-là, dans ces lieux sans saveur où l’on tente de préserver ce qui reste de vie, au mieux ou au moins mal, que la bénédiction de l’Amour incarné vient se déposer : sur ceux qui ont oublié qu’ils vivaient… parce que Dieu est venu leur donner tout spécialement Sa vie.

samedi, décembre 23 2017

Après une grosse période de rush...

dimanche, novembre 19 2017

1ère journée mondiale des Pauvres

Grande nouveauté de l'année 2017, le pape François a instauré le 33ème dimanche du temps ordinaire une "journée mondiale pour les pauvres". Et si fixer cette journée le dernier dimanche "officiel" du temps ordinaire était aussi une manière de nous dire qu'il faudrait réussir à mettre cette "option préférentielle pour les pauvres" en premier de tout ? 

Il ne suffit pas d'en rester au malaise de tous ces gens qui n'ont pas de quoi vivre et "résident" dans la rue à deux pas de chez nous, 
Il ne suffit pas de nous indigner,
Il ne suffit pas de les regarder de haut... ou, pire, de ne plus les voir, devenus indifférents,
Il ne suffit pas de nous dire que nous sommes tous des pauvres en quelque chose (même si c'est aussi vrai),
Il ne suffit pas de parler de la pauvreté et des "pauvres" en général... 

.... mais, justement, ce qui est certain, c'est que le pape François en a profité pour écrire un beau message, intitulé "N'aimons pas en paroles, mais par des actes" qui n'est pas qu'une parole en l'air mais bien une invitation concrète à aller rencontrer le Christ en nos frères les plus démunis et à les mettre au centre de nos actions, pour que celles-ci soient remodelées par une charité qui soit vraie. 

 

Un court extrait : 

§3 "Ne pensons pas aux pauvres uniquement comme destinataires d’une bonne action de volontariat à faire une fois la semaine, ou encore moins de gestes improvisés de bonne volonté pour apaiser notre conscience. Ces expériences, même valables et utiles pour sensibiliser aux besoins de nombreux frères et aux injustices qui en sont souvent la cause, devraient introduire à une rencontre authentique avec les pauvres et donner lieu à un partage qui devient style de vie. En effet, la prière, le chemin du disciple et la conversion trouvent, dans la charité qui se fait partage, le test de leur authenticité évangélique. Et de cette façon de vivre dérivent joie et sérénité d’esprit, car on touche de la main la chair du Christ. Si nous voulons rencontrer réellement le Christ, il est nécessaire que nous touchions son corps dans le corps des pauvres couvert de plaies, comme réponse à la communion sacramentelle reçue dans l’Eucharistie. Le Corps du Christ, rompu dans la liturgie sacrée, se laisse retrouver, par la charité partagée, dans les visages et dans les personnes des frères et des sœurs les plus faibles. Toujours actuelles, résonnent les paroles du saint évêques Chrysostome : « Si vous voulez honorer le corps du Christ, ne le méprisez pas lorsqu’il est nu ; n’honorez pas le Christ eucharistique avec des ornements de soie, tandis qu’à l’extérieur du temple vous négligez cet autre Christ qui souffre du froid et de la nudité » (Hom. In Matthaeum, 50, 3 : PG, 58)" 

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mardi, février 14 2017

L'oeil était dans le couloir du métro

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Ils étaient trois dans ce recoin bien en coin des couloirs de métro. Près d'eux, la foule passait, distraite, nez sur son téléphone, pressée ou en train de parler à son voisin. Eux trois, ils cachaient un truc... et ils avaient l'air complètement "défoncés" par une substance très illicite. Pas besoin de m'approcher davantage : ils étaient jeunes et avaient l'air vieux et malades ; la vie était devant eux et ils auront très certainement prochainement des soucis avec la police et, plus grave encore, avec leur santé, si ce n'est déjà le cas. Trois êtres aux vies cabossées. 

Je crois que je les ai regardés au passage avec une compassion malheureusement trop condescendante, qui m'a semblé peu chrétienne. 

Hier, à la messe, la première lecture venait de la Genèse avec l'épisode du meurtre fratricide d'Abel par Caïn et le prêtre cita dans son homélie le fameux vers de Victor Hugo : "L'oeil était dans la tombe et regardait Caïn". Que fait cet oeil, celui du Seigneur ? Bien sûr, une conception trop étroite pourrait nous faire nous mettre le doigt dans l'oeil en y voyant le regard sans merci d'un juge inquisiteur. Et si ce Dieu qui nous regardait, c'était pour nous dire qu'Il était toujours avec nous, et qu'Il nous regarde, simplement, tels que nous sommes, y compris jusqu'à "nos reins et nos coeurs" ? Parfois, Il doit avoir quelque peu une conjonctivite à supporter de voir tous nos péchés... mais je suis sûre que tout brûle dans le brasier de Son amour, dans l'incandescence amoureuse de Son regard. 

Savoir que Dieu nous regarde, sans cesse, où qu'on aille se cacher ou, au contraire, où qu'on aille vivre au plein jour, cela change tout : 
C'est tout mettre dans la Lumière de Son amour ;
C'est voir, ou plutôt regarder, vraiment car Il est la vraie Lumière qui donne relief aux actes et aux êtres...
Comme un appel à regarder comme Lui, à aimer sans condescendance, sans jugement a priori ni a posteriori,
A regarder, simplement avec la justesse d'un coeur ému aux entrailles qui fait s'élever une humble prière vers Son Seigneur. 

 

lundi, septembre 19 2016

Est-ce que j'ose y croire pour moi ?

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En allant te voir, cette phrase me revenait, lancinante : "est-ce que j'ose y croire pour moi ?".

Cette phrase, je ne l'évoque jamais sans émotion : elle était de feu mon premier père spirituel, un vieux moine plein de sagesse, à quelques mois de sa mort, atteint par la maladie aggravée par l'âge de manière irrémédiable... Lui qui avait donné toute sa vie au Christ, qui portait en sa prière tant de personnes et de cas difficiles, il se reposait cette question face à sa propre mort. Comme s'il voulait me dire dans ses ultimes conseils cette importance extrême de la croissance de la foi, tout au long de notre vie : toujours des "oui" à dire, jamais à s'endormir. Et même, et surtout justement, face à ce moment crucial qu'est notre mort. 

Quand certains non-croyants me disent d'un air supérieur que la foi est une béquille, dans le fond, j'ai également envie de leur rendre leur sourire quelque peu narquois... Comme si la foi était une boite de caramels douçâtres qui suffisait à bercer le coeur du croyant d'illusions ! Comme si elle suffisait pour avancer dans la vie en boitillant un peu mieux ! 

La foi, c'est tout le contraire. La foi te donne un élan dans ta vie, un sens et une profondeur... mais la foi n'est pas une consolation-doudou. La foi est dans le même temps un don, complètement gratuit, et une force... mais une force qui nécessite de l'entraînement. Une force rude et douce à la fois. 

L'entraînement de cette foi, c'est comme une succession de petits sauts, toujours plus dans le vide. Où la raison ne peut plus guère intervenir, mais où Espérance, Foi et Charité se trouvent souvent curieusement mêlées. 

Tu sais, c'est avec douleur que je me dis que je ne sais pas quelle sera l'issue du terrible combat que tu mènes auquel j'assiste, impuissante. Mais je sais que j'ai aussi à poser, pour toi et avec toi, un acte de foi :
La foi, est-ce que j'ose y croire pour toi ?
La foi, est-ce que j'ose y croire pour moi ? 

 

samedi, mai 7 2016

Un chemin d'Assise (qui se fait debout)

Si je parle plus souvent ici de la via Francigena (d'ailleurs, il faudrait que je mette à jour la page ad hoc), je me suis aussi lancée l'année dernière avec des jeunes adultes du diocèse sur le chemin d'Assise dans un projet co-organisé avec un commentateur régulier de ce blogue (l'auteur des DiMails pour ne pas le nommer qui en a déjà parlé dans un récent commentaire). Les inscriptions 2016 sont lancées ici : jeunes cathos 92

Mais qu'est-ce que le Chemin d'Assise allez-vous me dire ? 

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Ce livre donne quelques précisions : non pas tant sur les étapes qu'on trouve par ailleurs sur le site dédié, à propos de ce chemin de randonnée au tracé récent, qui relie la première communauté franciscaine en France - Vézelay - à la patrie du poverello - Assise, mais sur ce qui s'y vit. 

Bien évidemment, comme tout chemin de pèlerinage, qu'il s'agisse du Camino ou d'un autre, les effets personnels sont différents puisque les motivations le sont également. 

Pourtant, il est des données communes, même quand c'est la surprise qui préside au départ comme ici : "Tu ne veux pas marcher vers Assise ?" de quelqu'un qui ne s'affirme pas si catholique que cela ! Le dépouillement, le départ, les questions profondes qui remontent... Et puis la marche dans la nature, cette mouvance indescriptiblement contemplative qui étreint le coeur du pèlerin et qui, en le plongeant dans la Création, le fait plonger toujours plus profondément en lui-même - d'aucuns diraient "en Dieu" et ce ne serait pas faux. N'y a-t-il pas d'ailleurs en cela quelque chose d'un esprit profondément franciscain, de cet émerveillement qui faisait s'exclamer au pauvre d'Assise son fameux cantique des créatures : "Loué sois-Tu mon Seigneur pour toutes les créatures" ! 

Ici s'écrivent et se disent aussi les rencontres, ces rencontres de pèlerinage, si précieuses, si anodines en apparence et pourtant tellement profondes, ces rencontres d'homme à homme, simples et vraies, sans fioritures ni jeux, d'où surgissent ces étincelles de vie et de joie où l'on distingue souvent la présence de Celui qui est le Chemin. 

Pour en lire plus, c'est Chemin d'Assise - l'aventure intérieure d'Olivier Lemire, en co-édition Bayard et éditions franciscaines. (>>)

 

En bonus pour ceux du diocèse... vous venez marcher avec nous ? 

mercredi, décembre 2 2015

Au-delà des "pourquoi" ? L'Autre Dieu

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- Pourquoi ? 

- .... " 

Face à la souffrance, nos mots achoppent mais ils ne sont pas les seuls : souvent, c'est notre raison qui défaille. 

Pourquoi ?

Quel intellect normalement constitué pourrait donner une réponse qui soit et sonne juste à tous ces malheurs, à toutes ces souffrances ? Qui sait réellement parler au chevet d'un enfant entre la vie et la mort ? 

Certains prient, certains se taisent, certains lèvent un poing rageur vers le ciel : d'autres  encore font les trois. 

Cette détresse de l'homme qui souffre, Marion Muller-Colard en a fait l'expérience devant son enfant entre la vie et la mort d'une manière encore plus aigüe que celle qu'elle avait déjà côtoyée en tant qu'aumônier d'hôpital. 

Dans cette catabase jusqu'aux tripes d'elle-même, jusqu'au plus profond de son amour, elle s'est perdue...

Elle a pourtant écouté, elle a prié, elle a relu son expérience et, avec ses connaissances de théologienne protestante, elle a aussi relu le livre de Job. Alors, des échos dans sa vie se sont faits entendre et elle a pris la plume pour nous les écrire avec une légèreté qui ne perd jamais sa profondeur. 

Dans une méditation avec Job, elle-même et le Seigneur, elle nous fait passer de la plainte, à la menace jusqu'à la grâce. Oh, pas avec des simplifications, non, mais avec la simplicité de la vie et de la foi, tournée vers le don de la vie. Elle ne répond pas aux "pourquoi", elle les dépasse, faisant s'écrouler notre paradigme si bien ancré qu'on n'ose se l'avouer d'un système rétributif entre nos actes et ce qui nous arrive et nous ouvrant en douceur à la grâce et à l'accueil vivant que nous pouvons en faire. 

 

Je cite son épilogue - comme je pourrais citer tant de passages de son beau livre : 

 

"J'aimerais être cette femme de foi, enracinée dans la Parole première d'un Dieu qui me préfère à rien et m'invite avec lui à poser des limites au chaos. J'aimerais prendre le relais du Shaddaï dans mes errances intérieures, et savoir dire à mon amertume : ça suffit ! Rien n'est dû, tout est donné. Quoi qu'il arrive, réjouis-toi que le soleil, chaque matin, se lève sur le monde et nvite tous les désespérés à brandir avec lui une opposition inconditionnelle à la nuit." 

 

Voilà, cela s'appelle L'Autre Dieu, c'est écrit par Marion Muller-Colard aux éditions Labor et Fides, cela fait tout juste 112 pages et si vous voulez vous prendre un bon coup de foi qui vient ouvrir un coin de plus chez vous à la grâce, eh bien, lisez-le. Vraiment. 

 

lundi, août 31 2015

Le Christ venu nourrir ses pauvres

 

http://www.les-precurseurs.com/wp-content/uploads/2015/04/Multiplication-des-pains.jpg

 

C’était il y a une dizaine de jours, une simple messe de semaine.

 

C’était une simple messe de semaine : la Parole de Dieu, le Pain qui devient Corps, le Vin qui devient Sang. L’extraordinaire présent auquel on ne s’habitue jamais.

 

C’était une simple messe de semaine : l’assemblée avait plus qu’aux 9/10èmes les cheveux plus que blancs mais, pour une fois, elle n’était absolument pas clairsemée. Elle était assise, parfois dans des fauteuils roulants, parfois avachie… Et là, il y avait pourtant une telle dignité régnante que nous, les quelques valides, n’osions même pas nous mettre debout : cela aurait eu quelque chose de malvenu, de malséant.

 

C’était une simple messe de semaine où les silences côtoyaient les réactions marquées à l’Évangile – un peu fort, semblait-il, à leur goût ! -, où les prières d’intercession étaient hésitantes, parfois oublieuses de leur fin, où personne n’avait envie de rire à des réactions inconsidérées des uns ou des autres, où les réponses de la messe et le Notre Père étaient dits encore avec une certaine conviction, car sus vraiment « par cœur », appris en ce temps-là où leur mémoire fonctionnait encore aussi bien que leur cœur et que leur capacité d’aimer. Et cette dernière, elle ne s’oublie jamais.

 

C’était une simple messe de semaine dans un lieu spécialisé pour ces personnes… avant tout des personnes : oui, des prières hésitantes, avec des balbutiements, des incompréhensions, des oublis, des rappels d’un temps très passé ressortis on ne sait comment à ce moment-là, mystère de la mémoire. Des prières semblant comme un peu ratées mais pourtant tellement réussies, tellement justes…

 

C’était une simple messe de semaine qui m’a remué les entrailles. Peut-être parce que j’ai un membre proche de ma famille aussi atteint de cette terrible dégénérescence cérébrale, peut-être surtout parce que cette messe, c’était vraiment le Seigneur qui se faisait proche des pauvres, très concrètement, parce que cette messe, c’était le mystère de l’Eucharistie à l’état brut.

 

C’était une simple messe de semaine qui redisait si fort combien elle célébrait la Vie.

 

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