Bernanos, ou la joie éclatante au cœur des ténèbres
Par Zabou le dimanche, janvier 13 2013, 21:45 - Lien permanent
Mettre une simple citation de Bernanos sur Facebook éveille parfois une discussion inattendue… d’autant plus quand elle est avec un de ses oncles ! Je ne vais pas rentrer dans les détails ici mais tout a eu pour source cette citation du Journal d’un curé de campagne que je trouve magnifique et qui s’adaptait à mon état d’esprit. Je cite donc :
« Mais c’est du sentiment de sa propre impuissance que l’enfant tire humblement le principe même de sa joie. »
Mon oncle a rebondi sur différents points mais, quant à l’auteur en lui-même, il disait : « Bernanos est un romancier du ressentiment, de la culpabilité et du désespoir » alors, que pour moi, Bernanos est le romancier de la joie ! D’ailleurs, l’un de ses romans porte même ce titre et je ne crois pas que ce soit un hasard.
L’ambiance des romans de Bernanos est certes lourde et pesante à chaque ligne comme si la bourbe du Mal et du péché empêchait aux phrases de prendre leur envol. Y percevoir la joie semble peu aisé car il ne s’agit pas d’une joie légère ou superficielle, il ne s’agit même quasiment pas d’humour dans ses romans et dans celui-ci en particulier – quel triste sire en apparence que le pauvre curé d’Ambricourt !
Et pourtant, et pourtant … « l’enfer, c’est de ne plus aimer » dit-il à la comtesse lors de leur mémorable entretien ! Et que lui répond-elle dans sa dernière lettre ? « Je ne suis pas résignée, je suis heureuse. […] J’irai me confesser demain à l’abbé X… [ …] J’ai péché volontairement contre l’espérance, à chaque heure du jour. » N’est-ce donc pas le curé qui la rend à la vraie joie ? En lui montrant qu’elle peut déposer, et donc dépasser aussi bien sa douleur de mère que le poids de son péché ? Que l’espérance est plus grande, que le bonheur est plus vaste ?
Et le curé est-il si triste pour s’exclamer en mourant, à l’instar de la petite Thérèse : « tout est grâce » ?
Alors que dire de cette citation si ce n’est que je la lis comme un appel à nous tourner humblement, les mains vides vers Dieu pour qu’il nous comble de joie ?
Encore plus profondément : comme un appel à savoir que nous n’avons rien à nous pour Le laisser emplir notre existence ?
« Te ipsum tibi reddam quando te mihi reddidero » (« Je te rendrai à toi-même lorsque je t'aurai rendu à moi ») fait dire à Dieu saint Augustin.
Impuissants… mais pouvant tout en Dieu !
Commentaires
Vision sensible, profonde, spirituelle, bien personnelle et originale, actant d'un bel esprit de chercheur . C 'est aussi pour ces raisons que Papa aimait tant avoir des échanges avec toi, et pourquoi tes profs apprécient tant leur étudiante et tes élèves leur prof...!
Thanks dad !