Zabou the terrible

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De l'art de jardiner ensemble plutôt que de cultiver seul son jardin

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Yeux pétillants et complices vendredi dans les ultimes minutes de la dernière épreuve du brevet : Quelques avions en papier en formation, d’autres qui se relisaient avec ardeur et enfin les autres qui regardaient passer les minutes jusqu’à l’heure où, enfin, ils seraient libérés.

 

Sourires mutuels avec beaucoup…. Il faut dire que c’est la première génération de collégiens que j’accompagne d’un bout à l’autre : nous sommes arrivés ensemble dans ce collège, eux en 6ème, moi pour mon année de « néo-tit’ », c’est-à-dire l’année après le stage, parachutée là je ne sais exactement comment.

 

Dans cette salle que je surveille, certains élèves eus en 6èmes, ou à d’autres niveaux, parfois plusieurs années de suite (3 ans sur 4 pour l’un d’entre eux !), ou pour des occasions ponctuelles : rares étaient ceux avec lesquels je n’ai pas eu l’occasion de partager ne serait-ce que quelques heures en 4 ans. On se connaît bien.

 

Et elle, cette bonne élève, qui me dit en me rendant sa copie : « Ah madame, on finit le collège aujourd’hui, là… Et c’était vous notre prof de français en 6ème, et puis notre prof principale en 5ème… ça fait bizarre de vous quitter, là, tout le collège ». Elle mettait des mots sur ce qui m’habitait : c’était bizarre leurs dernières heures au collège ; c’était beau de les voir passer leur brevet.

 

Pour moi, une légère émotion avec une joie teintée d’une certaine fierté : mes petits piou-piou tout perdus – comme leur prof qui arrivait ! – d’il y a 4 ans en arrivant au collège – qui avaient néanmoins pris très/trop rapidement leurs marques – allaient quitter le nid et devenir de (presque) grands lycéens. Oh pas tous avec des ailes fourbies, certes, souvent difficilement, souvent avec beaucoup d’hésitation encore, mais tout de même un chemin fut parcouru, pour et avec chacun et cela me faisait quelque chose. Des liens entre nous se sont créés en quatre ans, presque malgré nous. Et certains de ces anciens 6èmes de me rappeler quelques anecdotes sapides de leurs premiers mois au collège, et d'en sourire ensemble de concert.

 

On entend parfois une méfiance excessive vis-à-vis de l’attachement, dans les milieux catholiques comme professoraux alors que créer des liens humains est aussi tout ce qu’il y a de plus humain. Je me méfie d’un enseignement ou d’une foi sans incarnation qui ne prendrait jamais le risque de la relation.

 

Il me semble que ce n’est pas l’attachement qui est néfaste mais la possession : vouloir enfermer l’autre, en l’occurrence le garder collégien alors qu’il n’a plus désormais besoin que d'un peu d’aide pour s’envoler vers d’autres horizons où il sera confié à d’autres. Enfermer ces élèves dans leurs comportements passés, aussi, et ne plus espérer en eux, et ne plus rêver pour eux. 

 

Le professorat, c’est un lieu tout spécifique où apprendre à vivre la chasteté : on sème, on soigne, on cultive et, puis, la pousse ayant gagné un peu de vivacité, qu’elle soit de piètre ou de fière allure, on laisse vivre sans savoir comment elle fleurira, ni sous quelle forme, simples instruments par ce que l’on tente d’apporter de pédagogie, de connaissances et d’enthousiasme.

 

Quatre ans où nous avons appris à jardiner ensemble, côté prof et côté élèves… Bonne route, chers petits ! 

Et, même si vous ne croyez pas en Celui qui est ma vie et que je ne vous ai jamais parlé de Lui, que le Seigneur vous bénisse et vous garde sur les chemins que vous emprunterez ! 

Commentaires

1. Le mardi, juillet 4 2017, 07:47 par Chantal

Magnifique billet qui m'a émue aux larmes tant c'est l'essence de notre métier et de notre foi que j'y retrouve. Bonne route à tes petits collégiens, qu'ils continuent de crôitre et rencontrent d'autres adultes avec qui jardiner en confiance. Merci à toi pour ton regard toujours bienveillant et habité qui nous révèle tous ces germes d'espérance.

2. Le mardi, juillet 4 2017, 08:24 par satori1958

Il y a quelque chose de stupéfiant quand on lit ce témoignage et que j'ai été habité dès ta naissance par une obsession, celle de te laisser grandir vers ta liberté.
Il y a quelque chose de nécessaire dans l'affirmation de l'évidence que toute relation humaine comporte de l'affectif
Il y a quelque chose de résolument clairvoyant dans le sens donné à la possessivité
Il y a quelque chose d émouvant, parce qu'
Il y a de l amour.
Merci!

3. Le mardi, juillet 4 2017, 19:05 par nicole 86

Bonjour, je suis particulièrement touchée par : Le professorat, c’est un lieu tout spécifique où apprendre à vivre la chasteté. Lire ce qui m'a si souvent semblé inaudible, incompréhensible, me réconforte. Pour ces mots, MERCI.
Bonnes vacances

4. Le mercredi, juillet 5 2017, 22:08 par fanfan

Pas prof, infirmière (psy) et à la veille de la retraite... Et plein d'échos cependant - dans ce cheminement avec les êtres, le risque de l'attachement, l'émotion du départ, la confiance et la prière... "Seigneur, garde-les..." dans cette vie qui les attend toute de cahots et, parfois, d'infimes douceurs...
Vous êtes, toute jeune, une vraie "grande soeur" Zabou !
oui, MERCI ! et bonnes vacances !

5. Le jeudi, juillet 6 2017, 09:32 par Tigreek

Je suis d'accord avec toi sur la distinction à apporter entre attachement et possession...

Il y a quelque temps, en voulant rempoter une jeune plante, j'ai eu un geste un peu vif et ai brisé la tige... Mais pas sectionné, ouf ! Je lui ai adjoint un tuteur pour la tenir droite, permettre à la sève de continuer à circuler tout en faisant "attelle" pour qu'elle puisse se rétablir... Ce fut le cas au bout de plusieurs jours : elle avait consolidé la tige et était de nouveau solide.

L'attachement de cette petite plante au tuteur lui a permis de pousser et même de se rétablir. Mais si je l'avais serrée trop fortement, la sève aurait été bloquée et elle aurait probablement dépéri. L'amour véritable est une subtile alchimie entre attachement et autonomie...

Bon vent, bon jardin ! ;)

6. Le jeudi, juillet 6 2017, 09:43 par nicole 86

@ tigreek
merveilleuse image dont je me souviendrai et que je partagerai.

7. Le lundi, juillet 10 2017, 19:03 par Zabou

@ Tigreek : merci de cette très belle image oui ! 

Et, @ chacun, je souhaite un bel été ! :-) 

8. Le vendredi, novembre 10 2017, 16:27 par Rosalie

Magnifique ! Laissons les religions de côté, la seule chose qui peut nous rattacher à certains évènements de la vie, surtout entre générations reste l'humain.
Rosalie
http://www.cactus-et-rosalie.com

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