Zabou the terrible

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vendredi, octobre 15 2010

En service extraordinaire

« … Reçois le corps du Christ et que Dieu te bénisse…. »

 

Je tendis mes mains et reçus cette patène pleine d’hosties consacrées. Dépassée. Emerveillée. Rendant grâce pour le Pain de Vie que je venais de recevoir et préparant mon cœur à le transmettre à mon tour. Tête légèrement inclinée, écoutant dans mon cœur les paroles de bénédiction et d’envoi du prêtre pour cette mission à nulle autre pareille.

 

Ministre extraordinaire : on n’est rien, on ne fait que passer, que donner. Que transmettre ce que Dieu a d’abord donné, ce que d’autres mains ont consacré et ce que d’autres encore vont recevoir.

 

Moments aussi rares que fabuleux. Non parce que l’on se trouverait ainsi mis en avant, mais au contraire parce que l’on est alors pleinement dépassé par ce que l’on fait.

 

Quand on donne la communion, on est à la fois pleinement là et en même temps, plus tout à fait, tellement il y a à s’effacer derrière le sacrement, derrière Dieu qui vient se rendre présent et se donner ainsi à chacun. Rencontre personnelle, profonde, unique, dans laquelle nous n’avons pas à interposer notre présence humaine et ses interférences : c’est au Patron et à lui seul de faire tout le travail. Ministre, cela veut simplement dire serviteur.

 

Ce qui compte alors, ce n’est pas ma voix disant « le corps du Christ », ou bien mon pouce traçant une légère croix sur le front des enfants, ou même encore mes deux doigts tenant l’hostie, mais bien le Corps du Christ qui est là dans nos mains respectives. Présent.

 

Dans mon cœur, un curieux mélange de sentiments. Tant d’indignité que de dignité : indigne de le porter par mes propres et piètres mérites, rendue digne par cette humanité qu’Il n’a pas craint de venir partager. C’est peut-être pour cela que je sens rarement la fraternité portée à une telle incandescence qu’à ces moments-là : j’en reste émerveillée.

 

Et j’admire les visages et les mains de ceux qui s’avancent…

Le cœur priant, le cœur en action de grâce.

 

« … pour Le porter chaque jour avec amour jusqu’aux extrémités de la terre ».

Amen.

 

mardi, septembre 8 2009

Breizh Messe-braise

 

basilique de Folgoët

 

Il m’arrive de porter un regard distancié, amusé, quand l’occasion se présente de me rendre à la messe dans une petite église de pleine campagne. Moi, la banlieusarde, je goûte l’harmonium, les voix chevrotantes, les annonces de messe improbables, les usages liturgiques… « spéciaux ». Et pourtant…

 

Pourtant, au-delà de ce que je peux dire, au-delà de mes premières impressions, au-delà de tous ces souvenirs qui me ramènent aux doux mois d’été de mon insouciante enfance en Mayenne et en  Normandie, il se trouve là quelque chose qui m’impressionne, qui me touche dans l’intime de ma vie: leur fidélité inter- dimensionnelle.

 

Au milieu de quelques maisons dispersées, ils viennent, parfois de loin, se retrouver là tous les dimanches. On s’embrasse tous, on se connaît tous, on s’assoit les uns à côté des autres, on se raconte les dernières nouvelles (de ceux qui reviendront dans un an ou deux, ou jamais).

 

L’étrangère regarde, amusée. Amusée avant de voir ces messieurs du premier rang gauche qui ont certainement usé leurs culottes ensemble sur les bancs de l’école avant de les user à l’église. Avant de voir ces vieilles dames à la justesse de foi plus forte que celles de leurs voix usées par les années. Avant de voir ce curé rayonnant, pimpant pour ses 70 ans, rappeler qu’il fêtait aujourd’hui ses 10 ans d’installation comme curé de la paroisse. Avant d’entrer ensemble dans cette prière de l’Église qui est la nôtre.

 

Effata ! Le regard, s’entrouvre, s’élargit, distingue

Effata ! et voit :

cette force qu’il faut pour, chaque semaine, faire des kilomètres (et en plus, parfois, il fait froid !)

cette amitié vécue, signe de celle cherchée sans cesse avec le Christ

cet engagement dans les petites choses, pour que la liturgie soit belle « quand même »

ce courage pour continuer, toujours, « malgré tout », quand les forces vives de la jeunesse sont manquantes.

cette « pratique » qui ne va pas de soi.

 

Effata. Le regard change.

 

L’accusateur devient admirateur

L’amusement devient étonnement

La moue se mue en sourire du cœur.

 

Et le Christ accomplit encore un miracle, là, maintenant, tout de suite.

 

Miracle du quotidien, quotidien du miracle pour qui confie la prunelle de ses yeux au Christ.

 

jeudi, juillet 16 2009

Ô Toulouse

 
          Je pars, pars, sur les chemins du monde.
          Ou plus exactement dans le Lointain Sud, à Toulouse, au mariage d'une amie d'enfance dont je serai samedi la témoin.
          Ca va être chouette, c'est clair.
 
          Ce qui m'amuse aussi, c'est ce clin d'oeil matinal, dernier mail de la mariée à ses témoins qui nous retrace tout le programme de ces quelques jours à venir. Concernant dimanche, il y a la messe célébrée par son tonton père blanc. Juste après cette mention, on trouve : "Isa, tu gères la messe ?". Je ne comprends absolument pas pourquoi... Clin d'oeil
 
          Allez, zou, on finit le sac et on démarre la voiture pour "gérer de messes" et signer une paperasse, entre autres choses... Avec un grand grand sourire !

mardi, mai 19 2009

Ecclésia mou, sou, tou, mas...

 
 

Certains jours, l’écriture est difficile, tiraillés que nous sommes entre ce que nous voyons, vivons et l’impuissance de nos pauvres mots. Parfois ce tiraillement est interne, parfois on se le prend en pleine face, quand le ressort est trop tendu et qu’il lâche d’un coup. Il faut alors prendre le temps d’accueillir ces événements au creux de soi.

 

Beaucoup demandent : « Qui nous fera voir le bonheur ? » -Sur nous, Seigneur, que… Hum, ce n’était pas ça en fait que je voulais dire. Beaucoup s’interrogent, questionnent : « Ouais, ben moi, je croirai au Christ quand les chrétiens montreront l’exemple ! » ou, apostrophent les cathos d’un « Tu te prétends catho ? Vous n’êtes pas meilleurs que les autres ! »

 

Non, nous ne sommes pas meilleurs que les autres, c’est évident. Nous ne cherchons qu’à devenir pleinement humains et cela, ça prend bien une vie, je crois ! Mais ces remarques sont salutaires, elles nous entraînent à bouger, toujours plus, toujours mieux et à ne pas regarder notre petit nombril bien formé de pharisiens béats.  

 

Alors oui, nos communautés paroissiales ne sont pas des modèles et même, horreur, mutent parfois en de terribles contre-modèles que l’on a honte à avouer, où la lutte acharnée pour le maximum de pouvoir ne le dispute qu’à l’ambition d’être en vue. Tristesses, coups de gueules, incompréhension, engueulades forcenées aux naïfs qui font leur job, ne demandent rien d’autre et à qui l’on veut absolument faire prendre partie dans une stérile guerre des clans. Il y a des jours, certes minoritaires mais réels, où l’on a envie de tout laisser tomber, de laisser braire et d’avancer seuls, chacun de son côté.

 

Mais une Eglise sans ecclésia, non, je ne peux pas, non, je ne veux pas. Et, même dans les instants où la tension est palpable, il est beau de voir, sans nul idéalisme, qu’il est bon d’avoir ces frères et sœurs qui nous sont donnés : ce regard, c’est l’étincelle susceptible de rallumer entre eux, plus grandes gueules qu’autre chose, le Feu puissant. En clair : l’amour.

 

Ces derniers temps dans ma paroisse, cela sentait l’orage général. Présente de loin pour préserver ma tranquillité en ces temps délicats, je sentais l’électricité dans l’air à chacun de mes passages, me demandant d’où la foudre venait et où elle allait encore tomber et blesser des chrétiens de bonne volonté sans raison. Et je fustigeais mon regard trop critique.

 

Samedi, jour de fête. Un aumônier fatigué par un trop lourd traitement. Prêtre âgé, qui, chaque jour, vient les traits un plus tirés, qui tire sur la corde, on le sait, on le voit, on lui dit mais il en veut. Mais, quand je vois cet homme qui est aussi un ami j’ai à chaque fois un peu plus mal. Et, lui, ces 6 enfants-là du caté, il tenait à les baptiser, malgré tout.  

 

Quelques dizaines d’yeux pour le couver du regard. Disponibles pour le servir, lui approcher une chaise, lui tendre un micro : un ballet d’aubes blanches, ce soir-là curieusement concentrées en un mélange de joie et de détresse. Leur aumônier, notre aumônier…  mais ils n’étaient pas seuls à le veiller. Chaque baptême était joie, et douleur pour celui qui s’affaissait de plus en plus au dessus de la cuve baptismale : l’assemblée était unie dans une atmosphère orante. Ecroulement. Malaise. Pas de précipitation, pas de folie autour de lui, rien pour changer l’atmosphère : juste la certitude d’une Présence.

 

Doucement, l’assoir ; doucement, un verre d’eau ; doucement lui proposer un meilleur siège pour concélébrer le plus au repos possible ; doucement finir de vivre, ensemble -enfants du catéchisme, jeunes de l’aumônerie, orchestre des jeunes, servants d’autel, paroissiens habituels ou inhabituels, prêtres concélébrants- cette messe où le mot Communion s’est rarement fait aussi fort entre nous et en nous.

 

Quand l’ecclésiastique fit ecclésia.

 

A la fin de la messe, il prit le micro pour quelques paroles, qui n'étaient pas de lui, mais de l'Autre : « C’est à l’amour que vous aurez les uns pour les autres qu’on vous reconnaîtra pour mes disciples »

 

Samedi fut tragique et fut Beau tout à la fois. Et je ne sais en parler, de ce moment qui m’a tant touchée.

Et je ne sais qu’en dire. Je ne peux qu’essayer de prier, pour lui, et pour un mot dont le désir n’aura jamais été si fort en moi, simple petite laïque de base : Unité.

 

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